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Inédit
Tout public
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Sophie Dupont
Paris : Presses de la Cité, mars 2016
296 p. ; 23 x 14 cm
ISBN 978-2-258-13031-9
Coll. "Sang d'encre"
La traîtrise est un plat qui se mange tiède
Les plus anciens de nos lecteurs se souviennent peut-être du détournement du vol 8960 Air France qui se déroula le 24 décembre 1994 et qui a donné lieu à plusieurs polémiques. Quatre membres du GIA avaient l'avion puis l'avaient détourné sur Marseille où l'assaut par le GIGN avait été donné. C'est un peu le même fait divers qui sert de point de départ à ce roman de Olen Steinhauer. Les islamistes présentés dans À couteaux tirés détournent un avion sur Vienne, en Autriche. L'agence locale de la CIA est sur les dents car ils avaient connaissance de l'affaire et l'un de leurs agents se trouve justement dans l'avion. Ce sera d'ailleurs la première victime (dans l'affaire de 1994, il s'agissait d'un policier en civil des services algériens). Mais contrairement à ce qui s'est passé à Marseille, tout tourne mal. Des années ont passé. L'équipe d'agents secrets de Vienne s'est dispersée au gré des affectations et certains ont quitté le métier. Pourtant, tout va rebondir car l'idée a germé qu'il y aurait peut-être eu un traître dans les bureaux et que les islamistes auraient été renseignés. Henry, l'ancien responsable, fait le tour des membres de l'équipe afin d'en savoir plus. Il doit à présent interroger Celia, la dernière personne, une jeune femme qui a refait sa vie comme mère de famille en Californie. Il lui donne rendez-vous dans un restaurant...
Le roman est donc simple dans sa forme. Henry arrive en Californie et se rend au restaurant. Là il discute avec Celia et, de leur discussion, jaillira la vérité. Tout le récit est ponctué par des retours en arrière sur l'épisode viennois. Comme ce sont deux vieux amis qui bavardent autour d'un repas, le récit prend son temps et l'enquête reste calme et plan-plan, mais méthodique comme un vieil épisode des Cinq dernières minutes. On pense à des tableaux de Dennis Hopper : des clairs obscurs, des soirs tombants ou des nuits faiblement éclairées par des néons, des ambiances feutrées d'où pourraient surgir une violence subite, une sorte de crépuscule, de monde qui disparaît. On sent bien que Henry fait sa tournée d'adieu, avec une nostalgie non dissimulée, comme s'il se doutait déjà de la fin du roman, et que la clôture de cette affaire c'est aussi la clôture de sa vie, sa mise à la retraite définitive. Cherche-t-il vraiment à découvrir qui se cache derrière la traîtrise ou sait-il déjà tout ? Tout cela est raconté avec lenteur, comme serti sur une bonne idée qui aurait fait une intéressante nouvelle, mais qui a du mal à démarrer, n'arrive pas à passer à la vitesse supérieure et reste en activité réduite jusqu'à sa conclusion.
Citation
Je remarque ses ongles rongés presque jusqu'à l'os, et je me dis que sa dépression est sûrement liée à un déséquilibre chimique. Pour autant, je n'arrive pas à le plaindre.