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Roman - Noir

Jim Morrison et le Diable boîteux

Musique - Drogue MAJ mercredi 16 novembre 2016

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 17 €

Michel Embareck
Paris : Archipel, août 2016
214 p. ; 23 x 14 cm
ISBN 978-2-8098-2021-8

Rock'n roll perditude

Les vieux de la vieille se rappellent peut-être qu'avant d'être un excellent auteur de polars, maîtrisant parfaitement le style dur-à-cuire en pleine renaissance, Michel Embareck a été un (plutôt bon) critique "rock" durant l'âge d'or de la profession. Passé dont il a dû se souvenir pour l'écriture de ce roman inclassable : plus qu'un récit historique, il s'agit d'une rêverie autour de deux personnages trop grands pour eux-mêmes, soit Jim Morrison (bien sûr) et Gene Vincent, l'archange météorique, tout en examinant ce que le mythe a fait d'eux avant... et après leur mort. Le tout dans cette langue riche en images fortes et qui, pourtant, a l'élégance de s'effacer devant son sujet. On est loin de la vision moralisatrice d'un Oliver Stone sur les Doors... Cela dit, à premier abord, on pourrait croire à un énième "c'était mieux avant" célébrant un idéal "rock" déjà un rien faisandé à l'époque et définitivement mort aujourd'hui (il suffit de voir la page Wikipédia, ce grand ordonnateur de la conscience collective, consacrée au disco, raillant le mépris des vilains rockers pour ce genre, pour comprendre que le disco, soit la musique lyophilisée, a gagné...), mais Michel Embareck est trop lucide pour verser de sempiternelles larmes de crocodile. Au contraire, il brocarde le business fort lucratif de la nostalgie qui a participé de cette gigantesque récupération et enfoncé le dernier clou dans le cercueil du genre sans pour autant tomber dans le dénigrement post-mortem très à la mode (voir le Oliver Stone précité, travaillant le vieux cliché normatif du "ces artisssssses, ma brave dame, c'est pas des gens comme nous"). Inutile de dire qu'il ne flatte pas le lecteur dans le sens du poil et pousse même à réfléchir sur le rapport que l'on entretient avec ses idoles, ou plutôt la représentation fantasmée que l'on s'en fait. Parce qu'en fin de compte, ces soi-disant monstres sacrés dont on voudrait faire des bêtes de foire n'étaient que des hommes, peut-être pas prêts à se voir écrasés sous leur propre légende (Vincent orchestrant sa propre déchéance, Morrison délaissait une musique qu'il trouvait trop facile pour se consacrer à l'écriture en préparant une future œuvre cinématographique). Pour un roman se voulant grand public, c'est plutôt courageux...

Citation

La musique, toutes les musiques, ne sont que des interludes de bonne humeur, de sueur, d'oubli dans les égouts de la vie.

Rédacteur: Thomas Bauduret mercredi 16 novembre 2016
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