Geronimo

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Bande dessinée - Western

Geronimo

Ethnologique - Historique - Social MAJ mardi 06 juin 2017

Note accordée au livre: 5 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 18 €

Matz (scénario), Jef (dessin)
Jef (coloriste)
Paris : Rue de Sèvres, mars 2017
120 p. ; illustrations en couleur ; 29 x 22 cm
ISBN 978-2-36981-386-6

Mille maux indiens

Bien avant d'être un redoutable guerrier apache connu sous le nom de Geronimo, Goyahkla était l'homme-médecine du chef de tribu Mangas Coloradas. C'est son épopée que nous découvrons dans cette bande dessinée de Matz et de Jef, une bande dessinée qui dépeint à merveille la puissance et la gloire, mais aussi les trahisons et la chute. Matz est un humaniste et un écologiste comme l'atteste son personnage du Tueur à qui il a donné vie à plusieurs reprises avec son compère Luc Jacamon. Ce coup-ci, il est épaulé de Jef au dessin pour un scénario dont le double-objectif est le devoir de mémoire assorti à celui de la compréhension d'un peuple fier en harmonie avec la nature qui voulait vivre et mourir sur ses terres, libre. Les visions de Geronimo, à la fois funestes et prophétiques, sont là pour asseoir ce propos. Tout débute aux abords de la ville mexicaine de Kas-Ki-Yeh. Les hommes partis commercer, les femmes et les enfants sont massacrés par l'armée mexicaine. Geronimo n'aura de cesse de se venger au détriment parfois de la raison comme lorsque Mangas Coloradas l'avertira de la menace des Américains, les Yeux-Clairs. Au fil des pages et des escarmouches, entre 1850 et 1883, le lecteur côtoie trente-neuf guerriers apaches, tour à tour fuyant et combattant aussi bien les troupes mexicaines qu'américaines dans les montagnes avec fureur et frénésie. Avec une première reddition et l'humiliation d'être cloitrés et nourris dans une réserve sans arme et sans but, jusqu'à ce que la cupidité de l'agent Tom Tucker, qui vend les vivres qui leurs sont destinés aux colons, les force à s'enfuir. La suite est une brève déchéance romanesque paradoxale. Geronimo est une figure de légende, mais au contraire de ses alter ego apaches, Cochise et Mangas Coloradas, ou sioux, Sitting Bull, il ne meurt ni au combat, ni par traitrise. Il finit déchu et humilié, en exil. L'homme qui n'a qu'une parole, n'hésitera pas à se sacrifier pour le bien de son peuple. Le général Miles résumera à la fin de l'album parfaitement le hiatus entre Apaches et Yeux-Clairs : "Ce qu'ils ne comprennent pas, c'est que nous ne tenions pas nos promesses." Même Chato, le renégat guerrier enrôlé comme éclaireur au service de l'armée américaine, en sera une victime collatérale. Si elle n'est pas contemplative, cette bande dessinée – habilement découpée et dont des pages de hauts faits sanglants sont époustouflantes –, n'en est pas moins admirative à la fois d'un homme, véritable héros, et d'un certain mode de vie, qui nous est incompréhensible. Et puis elle est là pour nous rappeler que dès ses débuts la colonisation du continent nord-américain s'est faite au nom d'un capitalisme galopant et génocidaire, et que toutes les trahisons étaient possibles.

Illustration intérieure


Citation

Peut-être la mort est-elle préférable à cette vie-là... Et je crois que tu te trompes, Chato. Je crois que les Yeux-Clairs sont aussi fourbes que les Mexicains. Et je crois que quand tu t'en rendras compte, il sera trop tard, pour nous et pour toi.

Rédacteur: Julien Védrenne mardi 06 juin 2017
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