Contenu
Cérium
Grand format
Inédit
Tout public
258 p. ; 22 x 14 cm
ISBN 978-2-7491-4368-2
Le monde du travail est une jungle riche
Si l'on connait bien pour des raisons littéraires Patrick Raynal, qui est une figure importante du roman noir en France, son partenaire en écriture est moins connu. Pourtant, il aurait pu l'être, ayant postulé pour les primaires socialistes qui ont eu lieu il y a quelques mois. Les amateurs de littérature policière le connaissent néanmoins pour quelques textes liés au roman noir - même si la production littéraire de cet ancien inspecteur du travail est plus de l'ordre de l'économique et du social. Et ça se sent tout particulièrement dans ce roman où une grande partie de l'intrigue décrit le quotidien d'un inspecteur du travail, ses doutes, ses coups de gueule et la lâcheté de sa hiérarchie. Afin d'éviter que le roman ne se réduise à un pamphlet éclairant sur une fonction éminemment difficile, coincée entre un gouvernement qui finalement n'a pas trop envie de soutenir des fonctionnaires qui l'embarrassent, des patrons qui veulent les voir disparaître (certains commençant le travail en les abattant à coups de fusil quand ils viennent les inspecter), et une société qui n'aime pas les fonctionnaires et pense les impôts et la répartition sociale des bénéfices en terme de charge, Cérium choisit une intrigue policière.
Tout commence avec un ouvrier chinois retrouvé avec un bras en moins dans une cave parisienne. Accident du travail, comme on pourrait le penser naïvement. Jean Carré, le personnage central de ce roman, inspecteur du travail, comprend vite que la blessure est trop nette et qu'il s'agit d'un coup de sabre. Mais alors qu'il veut enquêter les pressions augmentent : une lettre anonyme dénonce un grand nombre de magasins chinois de l'arrondissement parisien où il travaillle, il est menacé et les forces de police semblent ne pas trop s'inquièter de la situation même lorsque d'autres Chinois sont retrouvés morts. Pour l'inspecteur du travail beaucoup d'éléments le ramènent à une société française, puissante dans le coin, et qui risque le redressement judiciaire alors qu'elle multiplie les bénéfices...
Au final, tout cela sera résolu. Le roman additionne quelques scènes plus techniquement policières pour faire passer de longs développements (très intéressants sur l'industrie, les magouilles fiscales ou liés au droit du travail). Le personnage avance entre des petites victoires et le rouleau compresseur du libéralisme. Nul doute, d'après Gérard Filoche et Patrick Raynal, que le nouveau Président et le nouveau gouvernement risquent de leur permettre d'écrire de nombreux volumes... Toujours est-il que le mot mystérieux du titre et la description de la communauté chinoise et de ses rapports avec la mère patrie intègrent le texte aride de l'inspecteur du travail dans une intrigue lui permettant de maintenir l'attention du lecteur. Bref, un bon équilibre entre la volonté du romancier Patrick Raynal d'insuffler de la vie quotidienne et sociale dans ses polars et pour Gérard Filoche de glisser ses notions d'essayiste économique et social dans une histoire intéressante à suivre.
Citation
Comment un tel cul-de-basse-fosse pouvait-il servir d''atelier' et abriter trois ouvriers ? On n'était pourtant pas en Chine, mais 29 rue Charlot, dans le 3e arrondissement de Paris.