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Inédit
Tout public
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Claire-Marie Clévy
Paris : Ombres Noires, août 2017
572 p. ; 21 x 15 cm
ISBN 978-2-08-137717-2
Le pays où le sucre coulait à flots
Les représentations des États-Unis dans l'imaginaire, et plus spécifiquement dans l'imaginaire du polar, sont très variables. En ce qui concerne Candyland, il pourrait y avoir la vieille ville, au cœur d'une région agricole ou minière en perte de vitesse. Les notables locaux gèrent la ville, pratiquent le népotisme et tous s'endorment tranquillement. C'est dans ce cadre que Braxton, un policier, va prendre sa retraite. Une retraite où il va devoir passer plus de temps avec sa femme, une épouse qu'il déteste mais qu'il a été obligé d'épouser. Dans les abords de la ville, il y a d'autres images du fantasme américain. Tout d'abord, sur l'ancien site d'un parc d'attraction, une famille de ruraux mafieux gère les différents trafics d'une main de fer, n'hésitant pas à porter la bagarre dans les rues de la ville, menaçant les policiers de représailles sur leurs familles. Parmi leurs dealers, des jeunes paumés de la région. De l'autre côté de la vallée, il y a une version opposée de la vie rurale étatsuniennes : des familles amish vivent en essayant de préserver leur mode de vie et en refusant tout contact avec la "civilisation". C'est parfois difficile car comment faire quand l'un des leurs disparaît, et qu'il ne faut pas faire appel à la police ? Or, plus jeune, Braxton a fréquenté une jeune fille des amish. Cette dernière, Sadie, enceinte, a fui avec un bébé et s'est installée à la ville sans que personne n'en sache rien. Le bébé a grandi et est un playboy connu. Sa mère de manière symbolique, est devenue une fabricante et marchande de sucreries très réputée, sa boutique ayant le même nom que le parc d'attraction : le Pays du sucre. Lorsque l'on retrouve un cadavre dans une mine parfois utilisée par les trafiquants, et que ce cadavre s'avère être celui du playboy, sans doute tué par sa petite amie, la nièce du policier, les choses se compliquent... Et encore, elles ne font que continuer un fil ancien, une tragédie inconnue survenue des années plus tôt.
Le récit concocté par Jax Miller est prenant, revenant sans cesse sur les différents protagonistes, sur des fausses pistes, des non-dits qui se poursuivent, des rancunes anciennes, comme une version de Roméo et Juliette dans l'Amérique rurale. Jax Miller prend son temps, décrit ces petits riens qui font la vie et les sentiments, montre par le souci du détail ces États-Unis des petites gens, d'un monde oublié et dépassé, délaissé. Ce soin d'entomologiste sur la province, sur des gens ordinaires, coincés par le monde dans lequel ils vivent, par les carcans de leur société, par les faux semblants et les mensonges, crée une atmosphère lénifiante très bien rendue que rompent des moments de violence sourde qui éclatent comme autant de coups de poings rapides après une longue danse des corps dans un match de boxe. Son intrigue, construite avec la précision d'une horlogère, révèle son lot de surprises et déplace régulièrement les centres d'intérêt du roman.
Citation
À chaque fois qu'elle entreprenait une activité, c'était avec les sourcils froncés et la sueur perlant quasiment au front ; Sadie avait l'obsession des apparences.