Contenu
Grand format
Inédit
Tout public
Traduit de l'anglais par Françoise Smith
Paris : Fleuve, octobre 2017
416 p. ; 21 x 14 cm
ISBN 978-2-265-11701-3
Coll. "Fleuve noir. Thriller"
Créer l'Homme nouveau
Dans un régime totalitaire, il peut devenir intéressant de se replier sur soi-même et de se concentrer sur les joies familiales. Même si, parfois, le parti s'installe au cœur même de votre famille. C'est le cas pour la policière d'Allemange de l'Est Karin Müller dont le conjoint dissident a eu l'autorisation de la quitter pour partir à l'Ouest. Mais la famille, c'est également la tristesse de la policière qui a dû avorter des années plus tôt car elle avait été violée par un collègue, à l'école de police. Cette tristesse va se trouver décuplée avec la nouvelle enquête qu'elle doit mener. Nous sommes en 1975, en RDA, et une sombre affaire trouble le parti : dans une ville modèle, construite pour servir au mieux l'homme nouveau communiste, la Stasi, autrement dit la police politique, met en point la venue de Fidel Castro, le dirigeant cubain. Tout doit être parfait et la disparition de deux bébés jumeaux risque de créer le trouble. Karin Müller est chargée de mener l'enquête, mais sans faire de vagues, ni trop révéler de choses à la population, ce qui peut s'avérer quelque peu compliqué. Tout va donc tourner autour de la maternité, de l'idée d'être mère. Entre femmes plus âgées, violées par les Russes à la fin de la Seconde Guerre mondiale (et sans doute est-ce ce qui est arrivé à la propre mère de Karin), jeunes ouvrières qui ont perdu leur enfants dans un accident de la route, et ceux qui sont enlevés par on ne sait qui, ce "concept" se trouve au cœur de l'intrigue.
Servie par une intrigue intelligente de David Young, qui joue sur des décalages temporels, entre le présent et différents moments du passé, remontant aux origines des raisons du ravisseur, au passé de l'héroïne, à des événements de sa biographie, Stasi Block montre un personnage central angoissé par ses propres liens familiaux, entre des parents adoptifs qui remplacèrent elle ne sait qui, un mari qui a fui et un amant qui la met enceinte dès la première rencontre. Avouons qu'il y a de quoi paniquer, d'autant plus que arin Müller a l'impression de ne pas être en odeur de sainteté (si cette expression peut s'appliquer !) avec la Stasi.
L'arrière plan historique et idéologique est montré avec justesse : la corruption du pouvoir, les faux semblants d'un régime autoritaire, sa façon de voir d'une manière particulière la vérité, les possibilités techniques de mener une enquête et de gérer à la fois l'enquête et la sanction judiciaire, sont décrits avec soin et renforcent la crédibilité de l'ensemble, faisant passer au second plan certains éléments qui s'abattent un peu trop facilement sur la policière. Ce deuxième volet des aventures de Karin Müller confirme les bonnes impressions qu'avait suscité le premier roman. C'est une série intelligente dont on attend la suite avec une curiosité impatiente.
Citation
La Stasi tenait à ce que la brigade criminelle se compose d'enquêteurs venus d'ailleurs. Selon les informations dont je dispose, elle compte ainsi étouffer dans l'œuf tout mouvement de panique.