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Inédit
Tout public
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Isabelle Maillet
Paris : Rivages, octobre 2017
456 p. ; 23 x 16 cm
ISBN 978-2-7436-4059-0
Coll. "Thriller"
Chrysalide vers la noirceur du monde
"Le Juste tombe sept fois et à chaque fois se relève" nous enseignent à peu près toutes les religions du monde, mais c'est un précepte qui a sans nul doute échappé à Rachel, car si elle l'avait mis à profit, sa vie en aurait peut-être été changé. Elle a grandi avec sa mère, se demandant qui était son père. Puis, elle s'est construite, a mûri et est devenue une journaliste prometteuse. Lors d'un reportage en Haïti, devant la misère et la violence qu'elle voit après un tremblement de terre, elle sombre dans la dépression et la phobie, et est de longues périodes incapables de sortir ou de croiser du monde. Heureusement, elle a rencontré un beau jeune homme qui va tout faire pour la calmer et la rendre heureuse. Toutefois, au bout de quelques temps elle se pose des questions sur cet homme aux attentions multiples qui derrière ses prévenances pourrait cacher de sombres mensonges et une double vie. Elle veut tenter d'en savoir plus, mais ne risque-t-elle pas une nouvelle fois de tout voir s'écrouler ?
Le compagnon en question, elle l'a rencontré quand elle l'avait embauché pour retrouver son père, une quête complexe et vaine, à première vue, mais qui aurait dû lui révéler combien le monde est fait de faux semblants : sa mère lui a menti sur l'identité de son père. De même, elle croit faire son travail de manière professionnelle, mais lorsqu'elle doit s'impliquer et que les sentiments ne peuvent s'empêcher d'affleurer, elle craque. Face à elle, son amoureux semble profondément passionné mais s'invente des voyages à l'étranger quand il ne retrouve pas un jeune femme enceinte dans une lointaine banlieue. Et lorsqu'elle croise l'un de ses amis rencontré, il évoque un passé bien différend de celui qu'elle connait.
Dennis Lehane maîtrise son métier et sait construire son histoire. D'ailleurs, il l'ouvre par une scène choc où l'héroïne, dans une grande douleur, abat son compagnon, avant un long retour en arrière qui explicite ce geste (mais il reste encore quelques surprises et ce flashback ne couvre que la première grosse moitié du roman. Le style s'adapte à cette construction pour montrer des facettes, évoquer des pistes comme si l'auteur lui-même jouait de ces faux semblants, de ces bouts de vérité qui pourraient se contredire. Les personnages cherchent la vérité au bout de leurs verres, comme des mouches se cognent contre les parois du verre qui les emprisonne, repartent en tous sens, mais sont incapables de s'arrêter pour trouver une solution patiente et satisfaisante. À côté de ses séries où il a montré tout son savoir-faire, ses stand alone sont des petits bijoux de construction, de portraits de personnages et des réussites pour décrire l'humain dans sa complexité et ses doutes, ses failles et ses petitesses.
Citation
Un mardi de mai, l'année de ses trente-cinq, Rachel abattit son mari d'une balle en pleine poitrine. Il recula en titubant, l'air étrangement résigné, comme s'il avait toujours su, au fond de lui, qu'elle en arriverait là.