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Grand format
Inédit
Tout public
232 p. ; 20 x 15 cm
ISBN 978-2-918767-79-4
Coll. "Fictions"
Tueur sans gages
Avec Le Parisien, Jean-François Paillard renoue avec la mythologie du film policier français des années 1970-1980 quand un justicier descendait de la Capitale pour remettre de l'ordre dans la cité phocéenne. Mais son personnage de Narval (qui comme ses prédécesseurs n'aime pas porter des cornes, fussent-elles de licorne des mers) n'est absolument pas un flic intègre. C'est un tueur qui a fait longtemps ses classes dans l'armée – du Congo-Brazzaville à l'Irak –, qui en a été meurtri (essentiellement par l'inaction, un sentiment de ne servir à rien, et par les horreurs qu'il a vues et que sa hiérarchie n'a pas voulu combattre) et qui est revenu à la vie presque civile des cauchemars plein la tête. Mais il a aussi, du moins le croit-il, des camarades qu'il compte sur les doigts d'une main amputée et sur lesquels il peut compter les yeux fermés. C'est d'ailleurs par l'entremise de l'un d'eux qu'il débarque à Marseille pour servir de porte-flingue du maire de la ville qui est menacé par un dealer. Les choix de Narval ne sont pas tous excellents, et loin de là, mais il a trouvé un hôtel qui va lui faciliter la vie compliquée qui s'annonce pour les prochains jours. Car il y croise à la réception Djamila qui lui fera par la suite rencontrer Jean-No, et les trois feront une paire d'exception dans le maelström marseillais. Le périple du Parisien aurait pu être classique et bien ficelé. Mais il se retrouve dans une combine qui mêle politiques et truands dans laquelle il est censé porter le chapeau. C'est sans compter un coup de pouce du destin et une volonté farouche de s'en sortir, pas toujours avec malice, mais il est entêté. Le Parisien, c'est avant tout un roman à la facture classique héritée de Jean-Patrick Manchette. Narval maîtrise, voire excelle, dans tout ce qui est armes à feu. Il a la technicité chirurgicale des tueurs à gages de l'auteur précité. Il est embarqué dans une histoire dont il ne connait absolument pas tous les tenants et aboutissants, mais il a compris qu'il faut agir et non subir. Alors il agit, conduisant un duo hétéroclite et sympathique, mais non totalement atypique : Djamila et Jean-No. Elle, c'est un peu la rebeu des quartiers dont il va tomber forcément amoureux et qui se révèlera une parfaite femme fatale. Lui c'est un ancien docker forcément politique, forcément entier, donc condamné à y laisser sa peau. Il y a de la noirceur dans ce roman et aussi de l'amour. Mais il y a surtout du désespoir en pagaille. Si l'intrigue est connue, les atermoiements et les errements introspectifs de Narval avec en filigrane les nombreuses guerres traversées dont il n'est absolument pas sorti indemne donnent à ce roman son lot d'aspérités. La plus intéressante est sans nul doute son regard amer sur la façon cynique dont les Européens traitent les conflits, et ses nombreux syndromes post-traumatique. Le Parisien est une personne tourmentée. Mais qui en doutait ?
Citation
La dernière fois que j'ai vu Giorgi, c'était à la Brasserie Lorraine, place des Ternes. On y buvait un café en digérant ce qu'on avait ingurgité chez son copain corse. Il avait l'air plutôt enjoué, le Gros, malgré la tache de sauce aux cèpes qui déshonorait sa cravate. Jaune canari, la cravate. Il était bien le dernier des hommes sur Terre à s'infliger une teinte pareille. Mais bon, les goûts et les couleurs...