Le Témoin solitaire

La journée avait été longue et déprimante ; les mêmes trajets, les mêmes fournisseurs, les mêmes clients, les embouteillages, les innombrables cons, le trafic parisien, la même solitude au milieu de ces millions d'inconnus.
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Roman - Noir

Le Témoin solitaire

Social - Braquage/Cambriolage - Urbain MAJ dimanche 14 octobre 2018

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 22,4 €

William Boyle
The Lonely Witness - 2018
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Simon Baril
Paris : Gallmeister, octobre 2018
298 p. ; 21 x 15 cm
ISBN 978-2-35178-191-3
Coll. "Americana"

Ni Dieu ni amour

William Boyle a fait du quartier new-yorkais de Gravesend, le personnage principal de son premier roman traduit en français aux éditions Rivages. Le Témoin solitaire, chez Gallmeister, remet au centre de son intrigue ce quartier et ses habitants. Si l'on suit les errements et les questions existentielles d'Amy Falconetti, on apprend également à connaître toute une faune de personnes solitaires et touchantes, miséreuses, voire misérables et ordinaires, qui ont toutes leurs manières à elles de survivre dans cette jungle urbaine.

C'est qu'il aime Brooklyn, et plus particulièrement le quartier de Gravesend, William Boyle. Durant près de trois cents pages, Amy va le parcourir de long en large, prendre le métro, quelques Uber, s'arrêter au Liu's pour manger des mets chinois servis par Xiùlán tout en visitant alternativement les appartements de Mme Epifanio et de Diane. La plume attendrie du romancier s'attarde sur ces vies issues de générations de déracinés italiens qui tentent de se trouver un but. Au début du roman, Amy semble en avoir trouvé un. Elle est entrée un jour dans l'église de St Mary's, n'a pas vraiment accueilli la foi, mais a rencontré monsignor Ricciardi, qui lui a donné un moyen d'oublier Alessandra partie à Los Angeles parce qu'elle rêvait d'être actrice et de quitter ce quartier. L'ancienne barmaid du Seven Bar délivre les communions aux personnes âgées en même temps qu'elle vient briser la monotonie de leurs vies. Elle n'a plus touché un verre d'alcool depuis des lustres, et s'exerce à la patience. Jusqu'à ce jour où elle se trouve chez Mme Epifanio et qu'elle se confronte à Vincent, un garçon aussi désagréable que grossier, et qui pourrait être violent. Vincent, c'est la pierre angulaire qui tombe de l'édifice pacifique que s'est longuement bâti Amy. La jeune femme le suit, l'observe, et assiste à la fois subjuguée et impuissante à son assassinat en pleine rue. Si elle récupère ses dernières paroles ainsi que l'arme du crime, elle reçoit en échange des vagues d'ennuis et de souvenirs, dont le moindre n'est pourtant pas le crime perpétré par son voisin Bob Tully, enfoui dans les tréfonds de son cerveau, alors qu'elle n'avait que dix-neuf ans. Parce que deux personnes vont refaire leur apparition. D'abord Fred, son père, disparu quand elle était toute petite. Ensuite Alessandra, de passage pour un casting. De quoi mettre un fouillis dingue dans la vie rangée qu'elle tente d'avoir. Les petites attentions de monsieur Pezzolanti, son logeur, n'y changeront rien. Surtout que Dom, le tueur, vient lui proposer un étrange marché : récupérer les bijoux que Vincent a volés et cachés en échange de cinq mille dollars. Cinq mille dollars ce n'est pas beaucoup d'argent, sauf quand on veut partir pour refaire sa vie. Alors Amy accepte, mais à ses conditions à elle. Et tout cela va l'amener à s'insinuer dans l'intimité de gens dont il aurait mieux valu ne rien savoir, à se coltiner des embrouilles en pagaïe. C'est un roman à la fois émouvant et sensible, à la fois intimiste et cru, à la fois beau et noir. William Boyle nous régale de ces petits détails qui nous font apprécier au plus près ce quartier de Gravesend avec sa galerie de personnages. Surtout, il propose une intrigue ordinairement foutraque avec une Amy plus désorientée que jamais, et qui passe l'essentiel de son temps à tenter de stabiliser la boussole de sa vie. Le romancier s'inscrit dans la longue veine de ces écrivains qui décrivent la Grande Pomme, une ville bien singulière ! Et Amy Falconetti en est une témoin bien solitaire...

Citation

Les gens font comme ils peuvent, ils essaient juste de survivre. Autrefois tu avais des disques, au moins. Raccroche-toi à ce que tu peux, tant que ce n'est ni Dieu ni l'amour.

Rédacteur: Julien Védrenne dimanche 14 octobre 2018
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