Contenu
Poche
Réédition
Tout public
296 p. ; 17 x 11 cm
ISBN 978-2-7436-4546-5
Coll. "Noir", 17
Cavallier solitaire
Il y a une certaine poésie qui se dégage de ce roman crépusculaire d'Hugues Pagan. Son personnage principal, Jacques Cavallier, est un ancien flic devenu pigiste pour un journal de province qui voit son quotidien éclater losqu'un certain Zimmer fait un dépôt de cent mille francs sur son compte bancaire. Pour le lecteur, il n'y a aucun doute : quelqu'un cherche à mouiller ce personnage plutôt sympathique mais pourquoi ? Dans l'immédiat, d'anciennes connaissances réapparaissent dont l'ex-femme de notre protagoniste et un autre flic qui a beaucoup de métier ; ils ne tarderont pas à disparaître tout aussi rapidement mais non moins sauvagement. Et puis, un autre versement a lieu, cette fois de deux cent mille francs. Et puis notre homme se sent suivi. Lui, il continue son métier de pigiste à bord de Dizzie Mae, une Ford qui consomme de façon indécente (aujourd'hui) du carburant, et s'intéresse à la traque du tueur de femmes. Surtout, il a le malheur de tomber amoureux d'Anita, une petite jeune qui travaille dans son canard et dont il pourrait être le père. Malgré la grosse différence d'âge, on sent bien que les deux représentent l'un pour l'autre une bouée de sauvetage. Mais Hugues Pagan a décidé que la tempête s'abattrait en pleine mer des sentiments, et le naufrage guette l'un et l'autre de ces amoureux, mais en des points géographiques opposés. Les Eaux mortes c'est avant tout un roman d'amour avec toutes les angoisses qui l'accompagnent. D'ailleurs, Hugues Pagan ne sait pas écrire autrement. Ses intrigues sont policières pour épouser les sentiments de ses personnages. Les scènes d'amour charnel, qui sont des scènes très difficiles à écrire, sonnent juste. Les scènes d'angoisses sentimentales, quant à elles, foisonnent et émergent de pages d'une violence inouie, tant physique que morale, où la peur de la vacuité est omniprésente. Il faut dire que ce Cavallier solitaire va devoir apprendre à vivre en couple et à s'émanciper de son passé. Ce passé, c'est un frère, véritable caïd, qui a prévu une opération d'envergure là où habite Cavallier. Cavallier, qui a beaucoup de défauts, dont celui de vouloir régler ses comptes tout seul, va partir en croisade en largant quelques amarres. Le roman est d'une noirceur absolue parsemée de petites touches nostalgiques et de références culturelles (surtout littéraires). Joliment construit, hommage au genre des années 1970-1980, Les Eaux mortes est avant tout un roman noir à contre-courant de ce qu'était ce type d'ouvrages avec héros solitaire qui meurt pour ses convictions. Chez Hugues Pagan, l'amour est définitivement un amer.
Citation
Pour un homme qui venait d'échapper à la mort, il était calme et tranquille. D'un geste négligent, il me désigna un fauteuil. J'y pris place. Ça n'engageait à rien. Tellier était revenu, à lui le piège à con du tueur de femmes, et les relations avec la région. Sans compter les charognards. Par interphone, Sauvage fait savoir qu'il était en conférence. Bon Dieu, il avait été contaminé par les charlots du Rotary.