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Inédit
Tout public
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Lazare Bitoun
Paris : Le Seuil, septembre 2018
384 p. ; 22 x 15 cm
ISBN 978-2-02-136972-4
Coll. "Cadre noir"
L'espion qui voulait rester au froid
Simon a tout pour être heureux. Il a un très bon travail dans une maison d'édition américaine. Mais ce nouveau travail cache le fait qu'il a été viré d'un poste dans la haute administration américaine car son frère a été un espion soviétique qui a dû fuir à Moscou pour éviter d'être arrêté. Et aujourd'hui ce frère le contacte car il a décidé d'écrire ses mémoires, et le livre pourrait être un best-seller capable de redonner du souffle à la maison d'édition, voire d'améliorer le poste de Simon. Simon part donc pour la Russie, et il ne tarde pas à comprendre, en arrivant à Moscou, que la situation va être plus difficile que prévu. Tout d'abord, parce que les services secrets américains lui ont demandé de profiter de son séjour pour tenter de regarder et de transmettre le maximum de détails sur l'ensemble des transfuges qu'il pourrait rencontrer. Ensuite parce qu'il apprend par son frère que ce dernier a uniquement écrit ses mémoires dans le but de le faire venir. Il veut que son épouse qui s'étiole et sombre dans l'alcoolisme puisse regagner les États-Unis, et il est même prêt à fuir avec elle en échange d'informations sensibles. Comme il est le principal conseiller technique pour les espions russes qui sont envoyés en mission à l'Ouest, il a dans sa tête des listes de noms qu'il peut monnayer. Mais le monde moscovite des agents anglo-saxons passés à l'Est et celui de leurs surveillants est un univers clos, un véritable panier de crabes où tous se surveillent et s'espionnent, car l'angoisse est que l'un des transfuges soit en fait un agent triple et qu'il travaille en réalité pour l'Ouest. Le décès suspect de l'un d'eux change la donne : est-ce un traître sur le point d'être démasqué ou bien est-ce que le véritable traître, se sentant repéré, a "suicidé" celui qui aurait pu le dénoncer ? Les choses se compliquent encore lorsque Simon doute de plus en plus de la réalité de la défection possible de son frère. N'y aurait-il pas derrière tout ça un plan diabolique comme il n'en existe que dans le monde de l'espionnage ?
Écrit de manière classique, Moscou 61, de Joseph Kanon, est une véritable ode aux grands romans d'espionnage de John Le Carré : intrigues vertigineuses qui s'emboitent les unes dans les autres, mise en abyme constante de l'agent secret dont on ne sait pas pour qui il travaille (et pas sûr qu'il le sache lui-même !), le tout dans un décor qui malgré le cadre de la nomenklatura soviétique a du mal à cacher la tristesse et le lugubre des situations et de l'époque, reconstituant une atmosphère grisâtre, de fin de règne. Quelques scènes d'action, dont le dénouement, à hauteur d'hommes vieillissants ou qui ont perdu leur dynamisme, ponctuent le récit, lui donnant un peu de rythme, même si les longs développement autour des traîtres, des discussions sur la trahison, le sens du service, l'engagement, se lisent avec facilité. Joseph Kanon nous a proposé un joli roman d'espionnage à l'ancienne.
Citation
Un soldat. Je n'ai jamais été autre chose qu'un soldat. J'étais fier d'être entré au Service. Je le suis toujours. Je suis officier, maintenant.