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Préface de Paulo Lins
Alexis Peskine (illustrateur)
Traduit du portugais (Brésil) par Paula Anacaona
Paris : Anacaona, octobre 2009
260 p. ; 21 x 15 cm
Manuel de survie en milieu hostile
Une favela de São Paulo. Des enfants, des ados, des adultes, avec au fond de chacun d'eux, une dose de violence qui ne demande qu'à exploser. Alors, forcément, ça flingue, ça plante, ça venge et ça se défoule. Un monde où la vie humaine a une importance relative. Un monde où lorsque l'on serre une fille dans ses bras, on veille à ce qu'elle ne sente pas la crosse de son revolver que l'on a coincé dans la ceinture. Un monde où l'on n'est pas sûr de rentrer manger à la maison le soir, parce qu'il n'y aura peut-être rien à manger et que l'on n'est pas certain de vivre jusqu'au soir. Il y a les problèmes d'argent qui engendrent cette délinquance, parce que "le pire n'est pas de ne pas avoir, mais plutôt de savoir qu'on aura jamais". Il y a aussi cette richesse qui s'exhibe et qui exploite à quelques kilomètres de là. Il y a les flics véreux qui se remplissent les poches et les narines.Et il y a les parents désespérés de ne plus reconnaître leurs enfants.
Au milieu : Lucio la Foi, Magicien, Neguinho, Aninha et Régis. Régis qui "se rappelait toutes les chutes de ceux qu'il avait tués, souvent il ne se souvenait pas des visages, mais il gardait toutes leur chutes en mémoire, certains soulevaient de la poussière, d'autres tombaient sèchement, il adorait ce bruit". Ils cherchent un coup. Un gros braquage qui les mettra à l'abri et qui leur permettra de vivre. Vivre, un mot qui sonne comme un rêve hors de portée.
Pour autant, dans ce tableau sombre, Ferréz distille quelques touches de couleurs, en s'excusant presque des contradictions et des maladresses de ses personnages. Comme Neguinho Tache-à-la-main qui regarde Eduarda et qui ne sait dire si c'est cela, l'amour, "car il n'avait jamais bien compris la signification de ce mot, alors il arriva à la conclusion que, peut-être, ce qu'il ressentait pour Eduarda était simplement le contraire de ce qu'il ressentait pour ses ennemis".
Ferréz livre des dialogues abrupts, mélanges de verlan et d'expressions brésiliennes, ce langage du ghetto, ces conversations où se mêlent la peur, la familiarité et le désir de montrer à l'autre qu'il peut compter sur vous pour un coup de main, un conseil ou, si son jour est venu, une balle dans le dos. Une œuvre brute en noir et blanc, comme les illustrations d'Alexis Peskine qui rythment le livre comme autant de corps abandonnés, comme chacune de ces chutes que Régis affectionne tant.
Citation
... Le jour se leva le lendemain avec un gamin des rues en moins, les bras ouverts, le torse nu, les crampons au pied, un petit short bleu tenu par une ficelle blanche, les jambes droites, le visage tourné, le sang durci déjà mélangé à la terre, de loin on jurerait que ce n'était qu'un enfant, la tête pleine de rêves.