Contenu
Grand format
Inédit
Tout public
264 p. ; 21 x 14 cm
ISBN 978-2-226-45769-1
Coll. "Romans français"
Difficile de tirer avec de l'arthrose
Ce n'est pas aux vieux singes que l'on apprend à faire des grimaces. C'est ce que pourrait avoir eu derrière la tête Patrick Raynal en commettant ce roman. Dès le départ (tout en le soulignant avec plusieurs clins d'œil), il va nous jouer une scène si classique qu'on pourrait la croire éculée. Le narrateur se réveille car l'on frappe violemment à la porte. C'est la police. Pourtant il n'est pas dans son lit, et celle à qui appartient le lit et par extension la maison autour dudit lit est à côté de lui, entièrement nue, mais aussi entièrement morte !... Un grand classique, n'est-ce pas ? Et qui rend perplexe notre personnage principal car, comme il le reconnait lui-même, à son âge, il n'y a aucune raison qu'une belle jeune femme l'accueille dans sa couche et, en plus, il serait incapable de faire autre chose que de lui raconter une histoire pour qu'elle s'endorme. En tout cas, voilà notre homme embarqué par la police et accusé du meurtre. En prison, il rencontre du monde. Très vite, les avocats se précipitent pour l'aider et il comprend qu'il a été placé dans un piège tordu. On essaie de lui faire comprendre que pour s'en sortir il doit remettre la main sur son vieil ami, un gauchiste de ses années d'étudiant, devenu gangster. Seul problème : ce dernier est mort, lui aussi, depuis des années. Pourtant, on pense avoir trouvé sa trace car certains se sont emparés de ses "méthodes" soixante-huitardes pour coincer un policier ripou de la BAC. Est-ce vrai ? Est-ce une rumeur urbaine ? Personne n'a l'air d'avoir une réponse claire. Et quel rapport avec la future élection niçoise où les deux prétendants à la couronne se détestent et ont tous les deux besoin d'informations sur le gauchiste présumé mort ? Voilà donc notre personnage sortant de prison grâce à un alibi concocté par ses "amis", et sommé de retrouver son ancien pote décédé.
Comme on le voit, Patrick Raynal revient, par une sorte de boucle temporelle, à "sa" ville de Nice, et aux mafieux qui la contrôlent ou la dirigent. Entre flics pourris, anciens gauchistes pas forcément rangés des voitures, pièges sordides et coups tordus, notre septuagénaire retrouve un amour de jeunesse, essaie de vivre entre ses illusions, ses amitiés trahies et le souvenir d'un âge d'or qui est bien loin. Les amateurs retrouveront une description aiguisée de la ville et des coups bas, des magouilles sempiternelles, une révolte sous-jacente (et Patrick Raynal après avoir bien ri avec Jacques Médecin se paie avec bonheur Emmanuel Macron). Comme le dit le proverbe, c'est dans les vieux chaudrons qu'on fait les meilleures soupes. C'est en "recyclant" intelligemment et en revenant aux sources de ses premiers romans, mais en les incarnant non plus dans un jeune gauchiste sûr de ses certitudes, mais dans un vieil homme qui aimerait juste finir sa vie en paix, coincé par le monde qui le rattrape encore, que Patrick Raynal nous offre un nouveau roman, enjoué mais noir, avec un œil pétillant qui cligne pour nous appâter (et ça marche !).
Citation
Ces mecs tuent une fille, me fourrent au lit avec elle pour me faire porter le chapeau et, après m'avoir laissé mariner un mois, il me sortent de taule pour me confier une enquête super tordue sur un événement que toute la ville nie.