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Les Cinq règles du mensonge
Grand format
Inédit
Tout public
Traduit de l'anglais par Héloïse Esquié
Paris : Fleuve, mars 2021
428 p. ; 23 x 16 cm
ISBN 978-2-265-14399-9
Coll. "Fleuve noir. Thriller"
Les cinq règles de l'ennui
Trentenaire en couple, avec un nouveau-né sur les bras, Isa Wilde reçoit un message d'une de ses amies, Kate, disant simplement : "J'ai besoin de toi." Elle laisse alors tout tomber pour se précipiter vers elle, nonobstant le fait qu'elle ne l'a pas vue depuis quinze ans. À l'époque, Isa, Kate, Thea et Fatima s'étaient rencontrées alors qu'elles étaient en chemin vers Salten House, une école très sélect où Ambrose, le père de Kate, était professeur. C'est là qu'elles s'amusaient à mentir selon cinq règles sans trop se soucier des conséquences. Est-ce à cause de ce jeu qu'elles furent éjectées de l'école avant d'avoir fini leurs études ? Ou bien est-ce ce sombre secret qu'elles ont juré de préserver ? Un secret qui risque d'être exposé alors que se profile une réunion des anciennes élèves, et qu'une femme promenant son chien découvre un cadavre sur la plage. Un cadavre qui s'avère être celui d'Ambrose. Que s'est-il passé quinze ans plus tôt ?
Le polar anglais est en train de devenir une véritable cottage industry locale, mais malheureusement, ces romans finissent par tous se ressembler, présentant à chaque fois une nouvelle "Reine du suspense" (vu qu'il y en a une toutes les semaines, il y aura bientôt plus de "reines" que de roturières...). On pourrait ironiser facilement en tissant "Les Cinq règles pour rater un roman", et pourtant, celui-ci les coche toutes, à commencer par son point de départ : des personnages liés par un secret du passé qui se réunissent au moment où il risque d'être révélé ? Quelle originalité ! (À commencer par les précédents romans de l'auteure dont Promenez-vous dans les bois !) D'abord, on se demande pourquoi on fait tout un foin de ce "jeu", puisqu'à part leur première rencontre, ce qui donne son titre au roman, le jeu n'est pas développé, pas plus que les personnages qui ont droit à une simple caractéristique, comme dans les séries télévisées : l'une est ex-alcoolique, l'autre musulmane — ce qui n'est pas bon pour les parts de marché — les autres sont des personnages-Ikéa (uniquement là pour meubler) et si on affuble la narratrice d'un nouveau-né, c'est sans doute en une tentative dérisoire d'en faire autre chose qu'une chouineuse restant passive face à tout ce qui se passe et qu'on a constamment envie de secouer pour qu'elle arrête de ruminer pendant des pages et des pages sur n'importe quel sujet (généralement ouin-ouin le temps qui passe que c'est triste) et en vienne un peu au fait. Elle est de plus dotée d'un mari tellement compréhensif — sauf quand le script l'exige, ce qui ne rajoute ni tension ni conflit —, qu'on pourrait le qualifier de père Courage, ce qui changerait certes de la doxa si le personnage n'était pas si insipide. D'ailleurs, le fait que l'héroïne soit à deux doigts de le tromper à moment donné, ce qui, dans ce genre de roman, vaut la peine de mort pour n'importe quel personnage masculin, n'entraîne aucune question morale. Ce n'est même pas de la série télévisée prémâchée telles que les têtes de gondole l'aiment tant, vu qu'il y a également beaucoup de descriptions inutiles. Et, une fois réunies, les quatre amies semblent surtout s'empresser de ne rien faire (pas même se répéter à quel point elles sont si géniales et si fabuleuses et si extraordinaires, toujours contrairement à la mode), donnant au roman une absence totale de direction ou même d'enjeu (on ne sait ce qu'elles risquent exactement qu'après une révélation qu'elles ignoraient au moment de leur laborieuse réunion, bien trop tard pour instaurer la moindre tension). Quant au grand secret qui les lie, qui n'apparaît qu'après deux cents pages de moulinage, il semble bien innocent. C'est aussi le genre de livre où on nous met en grand moment "Aha !" une déduction que n'importe quel lecteur ou lectrice doté de trois neurones en activité aurait devinée si on lui donnait tous les éléments nécessaires. Pour ce qui est de la réunion des anciennes de l'école, retenez bien ce détail, car il n'a rigoureusement rien à voir avec ce qui suit, mais occupe tout de même page après page. Inutile de dire que quand vient une "révélation" finale tout aussi arbitraire que ce qui l'a précédée avec un personnage qui n'est là que pour ladite révélation, il y a longtemps qu'on a cessé de s'en soucier, d'autant qu'on en revient au vieux tropisme fatigué : si tous les personnages se disaient ce qu'ils savent au lieu de traîner, il n'y aurait pas de roman. La "Nouvelle reine du suspense psychologique", qu'ils disaient. Alors vivement la révolution...
Citation
Trente ans, c'est plus qu'assez vieux pour être policier. Mais je n'arrive pas à voir Mark Wren en homme de trente ans – je revois un adolescent de quatorze ans, couvert d'acné, avec du duvet sur la lèvre supérieure, se voûtant pour compenser sa carcasse de 1,87 mètres. Je me demande s'il se souvient de nous. S'il se souvient du jeu.