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Grand format
Inédit
Tout public
Traduit du japonais par Alice Hureau
Paris : Atelier Akatombo, novembre 2020
346 p. ; 21 x 15 cm
ISBN 978-2-37927-056-7
Coll. "Policier"
Hard boiled sauce wasabi
À Susukino, un quartier de la ville japonaise de Sapporo, tout le monde ou presque connait le détective. C'est un personnage américain sans le savoir qui traine son spleen de dandy ravagé par l'alcool, le jeu et le cynisme au Keller Ôhata. Il a une petite amie qui vit sa vie, et qu'il voit quand il a le temps. Il a un ami qui vit sa vie, et qu'il voit quand il a le temps. Et ce temps, il le consacre à jouer à l'Otello. C'est un homme de confiance en qui on ne peut paradoxalement pas avoir trop confiance. Seulement, il connait comme personne les milieux interlopes de la ville. Quand un étudiant vient le voir au sujet de la disparition de sa petite amie, c'est tout juste s'il ne le rabroue pas avant de lui claquer la porte au nez. Et puis il y a ce meurtre étrange, sordide et violent d'un serveur de maison close dans un love hotel. Dans les romans hard boiled américains, il n'y a pas de hasard. Dans la vie de notre détective, il n'y en a pas non plus. Il commence alors à enquêter un peu plus sérieusement, mettant à jour un portrait moins ordinaire, moins sage, de la petite amie ordinaire de l'étudiant. Avec ce premier volet consacré à son personnage de détective, Naomi Azuma installe une atmosphère particulière à son intrigue, se démarquant de nombre de ses prédécesseurs japonais. S'il enfile les clichés comme on enfile des perles à un collier, il le fait avec suffisamment de malice, de truculence et d'ingéniosité pour que cela passe. Le roman est truffé de références au genre, que ce soit dans la littérature ou dans le film noir. C'est un peu comme lorsque Hakira Kurosawa transpose une intrigue du "87e District" d'Ed McBain dans le Japon contemporain (Entre le ciel et l'enfer, 1963). Il commence par un long flashback qui nous replonge dans les années 1980. Dans un univers urbain constellé par les jeux d'arcade, les gangs de jeunes, les yakuzas, le commerce du sexe et l'alcool, et les jurons on suit les pérégrinations du détective qui rend coup sur coup, qui croise des femmes d'importance dont deux fatales (avec une ombrée d'un certain onirisme), et qui cache quelques sentiments derrière une dureté de façade. L'intrigue autant classique que linéaire prend le risque de trainer un peu à l'image du détective flâneur. Mais elle a cet aspect imagé, nostalgique et dur que l'on a dans les romans des années 1930-1940, et l'on s'amuse des contrariétés d'investigation quand il faut être présent devant un téléphone fixe à heure du même tenant. Le détective de Naomi Azuma est un véritable chien de chasse même s'il peut se laisser perturber. Il n'hésite pas à forcer des serrures, jouer les naïfs, prendre le risque de subir les foudres d'un yakuza et de s'attirer l'antipathie de ses amis informateurs (mais il ne les oublie pas au final). Le Détective est au bar, c'est un roman un peu old school qui mêle deux univers particuliers apte à ravir les amateurs de ce genre désuet qu'est le hard boiled. Et c'est le premier volet d'une série...
Citation
Mon cœur battait à tout rompre depuis tout à l'heure. Désormais, ma poitrine et mes tempes pulsaient elles aussi. On aurait dit une entreprise débordante d'activité qui aurait lancé deux filiales. Ma sueur ruissela.