Contenu
Du charme du parking à étages
Grand format
Inédit
Tout public
Traduit de l'italien par Laurent Lombard
Nantes : Ici même, septembre 2019
128 p. ; illustrations en couleur ; 24 x 17 cm
ISBN 978-2-36912-060-5
Émancipation tardive
Zolferini est un raté qui vit dans un taudis et dont même les petits boulots les pires du monde ne veulent plus. Plus de famille, plus d'amis. Des mauvaises idées en pagaille quand elles ne sont pas uniquement noires. On aurait tendance à le juger asocial (et avec raison) un peu trop vite car sous ses oripeaux de brute, d'ivrogne et de reclus se cache un homme qui attend qu'un jour sa conscience de l'humanité se réveille. Ce qui va arriver laborieusement (pour lui, pas pour le lecteur) au fil de ces pages émancipatrices. Car Du charme du parking à étages nous plonge dans une très bonne bande dessinée italienne de Marino Neri, qui est avant tout une satire sociale de l'Italie d'aujourd'hui (mais à travers elle aussi de l'Europe). Celle de Matteo Salvini, du racisme galopant et qui vient s'ancrer dans les couches les plus jeunes et bêtes de la société. Après trois premières œuvres remarquées et publiées chez Atrabile, le voici chez Ici même avec des thèmes récurrents. Drame de l'enfance, solitude, fantastique et onirisme dilués et diffus dans la réalité et errements dans une ville désolée et désolante.
Pas de garçon autiste (Cosmo), pas d'orpheline (La Queue du loup), pas d'enfant solitaire (Le Roi des fleuves), mais un quinquagénaire décati qui va croiser la route du fantôme d'un enfant immigré assassiné lâchement par une bande de trois jeunes Italiens dans un parking à étages. La ville de Marino Neri est inspirée des grandes villes désenchantées américaines comme Detroit, mais les panneaux indicateurs sont bien là pour nous montrer que nous sommes en Italie. On suit les déambulations de cet homme écorché presque vif jusqu'à sa rencontre avec l'avocat Cabrini qui habite Via Rivoluzione d'Ottobre (un comble) et qui va lui proposer un étrange marché juteux : accepter de plaider coupable du meurtre du jeune immigré en lieu et place des trois jeunes fils de notables qui l'ont assassiné. Un marché que Zolferini va accepter avant de se rétracter et d'affronter la société. La trame est simple et ordinaire. Marino Neri y ajoute le fantôme de ce jeune immigré qui recherche son nom et son histoire. Le lecteur attendra les dernières pages pour connaître l'un et l'autre. L'ouvrage est très plaisant à lire et à contempler malgré la tristesse qui se dégage de ses pages où la bichromie prédomine, et où le texte est minimaliste. Il y a du Corto Maltese dans les dernières pages avec ce merle qui parle à Zolferini et qui lui explique les vers. Il y a aussi de la nostalgie et de belles images qui nous restent à l'esprit longtemps après avoir refermé l'album.
Citation
Laisse tomber les rêves. Concentre-toi sur la réalité. Elle est déjà assez difficile comme ça.