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We Own This City
Grand format
Inédit
Tout public
Flic et voyou
Wayne Jenkins est un super-flic. Adulé par les jeunes recrues du Baltimore Police Dept, choyé par sa hiérarchie, couvert de médailles, et cité en exemple par la presse professionnelle parce qu'avec son unité d'agents en civil, il s'en prend aux gros dealers de la ville, réalise des saisies colossales d'armes et de drogue. Mais ce que l'histoire officielle a mis longtemps à réaliser, c'est qu'il y avait un autre Wayne Jenkins, et que celui-là, et son unité toute entière, mettait Baltimore en coupe réglée, multipliait les arrestations arbitraires, les brutalités policières, les faux témoignages, volait des sommes colossales et d'importantes quantités de drogue, montait des braquages et possédait un réseau de deal. Ils possédaient véritablement la ville... jusqu'à ce qu'elle se retourne contre eux.
Vingt ans après la série culte The Wire, David Simon et George P. Pelecanos retrouvent les rues de Baltimore pour une mini-série en six épisodes adaptant le reportage La Ville nous appartient de Justin Fenton (récemment paru chez Sonatine), journaliste au Baltimore Sun. Extrêmement fidèle au texte, la version de Simon et Pelecanos suit l'enquête d'agents du FBI et de procureurs relative à des soupçons de corruption et de brutalités policières dans une ville récemment ébranlée par des émeutes (l'affaire Freddie Gray, du nom d'un "suspect" noir décédé pendant son transport violent au commissariat). Petit à petit, la pelote déroulée par le FBI va révéler une systématisation des bavures au nom d'une politique du résultat, et la totale impunité de ce qu'il faut bien appeler un "gang" de flics, œuvrant en marge de la loi pour leur propre profit. Cette unité, la Gun Trace Task Force, dirigée par le charismatique Wayne Jenkins, obtenait des résultats insolents, au point que les multiples abus pour y parvenir (mensonges, brutalités, extorsion) étaient délibérément ignorés. Politique comme à l'accoutumée, le duo Simon/Pelecanos se sert de l'affaire Jenkins (remarquablement interprété dans toute sa démesure par Jon Bernthal - Walking Dead, Punisher) pour dénoncer l'incurie de la justice américaine, en guerre contre une partie de sa population, à ce moment de rupture historique qu'à constitué l'élection de Donald Trump pour les défenseurs des droits civiques. Icône d'une police du résultat, Jenkins est un authentique personnage de roman noir (comme ses coéquipiers, aréopage de truands à la petite semaine et de flics tourmentés) et les créateurs n'ont pas eu à nourrir artificiellement la fiction. Construit comme un puzzle dont les pièces s'assemblent peu à peu, au mépris de la chronologie, We Own This City enchaîne les vignettes, les preuves à charge comme les moments où Jenkins se révèle être un type bien, et évite tout manichéisme qui aurait nuit au propos. Des deux côtés de la barrière de la Loi on y trouve autant de héros que de voyous, et si la Baltimore de Simon, Pelecanos et Fenton nous frappe autant, c'est parce qu'elle nous tend un miroir là où d'autres séries policières, plus roublardes, préfèrent nous montrer des cartes postales. Essentiel !
We Own This City (6 x 60 min.) : réalisé par Reinaldo Marcus Green sur un scénario de David Simon & George P. Pelecanos d'après l'ouvrage de Justin Fenton. Avec : Jon Bernthal, Wunmi Mosaku, Jamie Hector, Josh Charles...
Citation
Si nous perdons la bagarre, nous perdons les rues.