Je vis la Bête surgir de la mer

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Roman - Espionnage

Je vis la Bête surgir de la mer

Politique - Guerre - Assassinat MAJ mercredi 15 juin 2022

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 21,8 €

Ulrich Effenhauser
Alias Toller - 2015
Traduit de l'allemand par Carole Fily
Arles : Actes Sud, janvier 2022
238 p. ; 22 x 14 cm
ISBN 978-2-330-16085-2
Coll. "Actes Noirs"

Noirceur de l'Histoire

L'action se déroule en 1978, en Allemagne de l'Ouest. Une Allemagne repue et qui vit sous la menace des terroristes d'extrême gauche. Kolnik est un commissaire de police vieillissant, une légende des services, car il est pétri de maniaqueries mais a des intuitions époustouflantes et a surtout une carrière exceptionnelles. Enfin, il est l'un des rares policiers qui dans sa jeunesse a choisi la résistance et n'a pas été lié aux écarts hitlériens de tant d'Allemands. C'est sans doute pour cette raison que Alwin Heller, son adjoint, l'apprécie, lui dont le père n'a jamais démérité du IIIe Reich. Au début de Je vis la Bête surgir de la mer, les services de police sont chargés de l'enquête sur la mort d'un professeur de musique, un homme rigoriste, exigeant à Ratisbonne, en Bavière. Mais était-ce une raison pour faire exploser sa voiture, le pulvérisant par la même occasion ? Alwin Heller contacte sa fille avec qui il avait peu de lien, car le professeur appréciait difficilement la vie "dissolue" de sa fille. Lorsque Kolnik accepte l'idée que le meurtre serait dû à un groupe d'extrême gauche qui aurait voulu liquider un ancien nazi, Alwyn Heller et la fille aimeraient en savoir un peu plus. Et lorsque Kolnik, pourtant casanier, demande à son adjoint de lui offrir son billet pour un match de foot qui se tiendra à Prague, ce dernier lui donne le billet mais ne comprend pas : Kolnik n'aime pas le foot. Et surtout lorsque le commissaire est retrouvé mort à Prague, assassiné, Heller pense que, peut-être, il avait décidé d'aller enquêter sur le passé du professeur de musique durant la Deuxième Guerre mondiale. Heller se fait alors convaincant et la fille l'accompagne de l'autre côté du rideau de fer. Mais la vérité est plus complexe et plus dangereuse qu'il n'y parait.

Voici un premier roman policier d'Ulrich Effenhauser assez étrange après un départ très classique (un mort dans l'explosion d'une voiture), l'enquête va soulever des problèmes sur le passé qui ne passe pas. Bien entendu pour un Allemand, principalement l'implication de certains dans les exactions de la période nazie et la façon dont ils se sont dédouanés après-guerre, dont le gouvernement allemand les a recyclés, dont les ennemis les ont utilisés pour être des agents secrets dans la machine occidentale. Ainsi le roman se décale vers l'espionnage, à travers un jeune policier qui découvre combien la boue et les compromissions ont recouvert sa soif de justice et les grands mots de démocratie ou de liberté. Même si le roman relate un fait divers qui pourrait être réaliste, l'auteur évite tout manichéisme, n'hésite pas à montrer comment finalement, tout le monde a bien envie que le secret continue, que le "petit policier" peut être muté, que l'on peut payer ou faire chanter des témoins ou complices éventuels. Le texte reste discret et le lecteur attentif comprend les non-dits, les vraies pistes qui se cachent derrière les morts successives. Dans la grisaille de l'intrigue les remous de la grande histoire se déploient au sein d'une histoire racontée au plus près de son personnage central.

Citation

Un rat qui se glisse dans les fissures du monde pour y mettre bas. La vocation de Heller était de mettre ce rat hors d'état de nuire. Il a cru que c'était possible. Puis il s'est rendu compte que non ; les rats prolifèrent dans la nuit.

Rédacteur: Laurent Greusard mercredi 15 juin 2022
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