Contenu
Grand format
Inédit
Tout public
176 p. ; 22 x 15 cm
ISBN 978-2-8159-4860-9
Coll. "Noire"
En vol serré comme une intrigue
Les amateurs de vieux bouquins se souviennent sans doute que parfois, à côté de polars classiques, la "Série Noire" a proposé des textes inclassables, à la limite des genres. Dans les années 1980, les éditions Sombres crapules avaient même fabriqué leur fond de commerce avec l'édition, la traduction de ce genre d'ouvrages, et ont ainsi proposé des romans de Russel H. Greenan ou de Richard Lortz de superbe facture. Une église pour les oiseaux aurait pu entrer dans de telles démarches éditoriales. Le récit oscille avec des personnages étranges autour d'un lieu lui aussi particulier. Dans une église désaffectée du Canada, un homme essaie de préserver la vie animale et surtout celle des oiseaux. Des cohortes de volatiles font leur nid dans les chapelles, les travées, construisent leurs nids autour des vitraux, sous le regard attentif du propriétaire des lieux, en délicatesse avec les voisins et la mairesse locale. Une mairesse bien ennuyée car elle est en train de s'apercevoir qu'elle a pris le pouvoir mais que certains de ses adjoints continuent les magouilles qu'ils avaient entreprises sous l'ancien édile. Des faits de corruption qui, outre le caractère illégal, pourraient se révéler être très dangereux pour la population, car il s'agit de tester des produits chimiques pour l'agriculture sans demander les autorisations nécessaires. Il faut ajouter au décor une prostituée et son maquereau qui ont justement comme client l'écologiste qui a acheté l'église, et qui entretiennent avec lui une relation un peu compliquée. Tout ce petit monde pourrait s'agiter tranquillement, mais des événements extérieurs vont précipiter les choses et amener de la noirceur dans la vie poétique des petits oiseaux, qui ne sont pas que des personnages annexes mais qui participent à l'action, et qui sont décrits avec leurs propres motivations.
Maureen Martineau a écrit un roman qui part un peu dans tous les sens, où l'intrigue louvoie comme ces oiseaux qui virevoltent dans le ciel au fil des courants et qui, plutôt que de migrer, trouvent plus simple de vivre dans une église chauffée. Chaque chapitre rebondit comme une balle de chistera et l'action change de direction constamment. Si ce n'était la noirceur des personnages, leur cynisme et leurs motivations peu altruistes, on pourrait même sourire et rire aux aventures telles qu'elles se déroulent et telles qu'elles sont racontées avec un humour pince-sans-rire de bon aloi. Servi par son intrigue, finalement très construite (et pour réussir à amuser, il faut souvent cette mécanique très bien huilée), Une église pour les oiseaux est un roman un peu marginal, mais finalement très intéressant et qui donne une bonne bouffée de fraicheur dans le polar. En ces temps de canicule, c'est appréciable.
Citation
Ça te surprend qu'une tueuse puisse porter une croix ? Mais c'est à cause de leur Dieu que j'ai commis mes crimes. Il m'a abandonné entre les mains du diable, comme ma mère aux mauvais soins de mon père.