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Inédit
Tout public
Traduit de l'anglais (Canada) par Hélène Fournier
Paris : Albin Michel, mars 2022
432 p. ; 21 x 14 cm
ISBN 978-2-226-45232-0
Coll. "Terres d'Amérique"
La lente disparition des civilisations
Dans le nord du Canada, la ville de Winnipeg où cohabitent tant bien que mal les Amérindiens et les Canadiens descendants d'Européens, chaque communauté vit presque en autonomie, en autarcie. Mais les règles de vie des uns déteignent sur celles des autres, et les guerres des gangs adolescents ont leur pendant chez les tribus autochtones avec, dans le North End, le quartier défavorisé des bagarres incessantes entre les noirs et les rouges. Régulièrement, des membres d'un gang organisent des fêtes. Une jeune fille décide de se rendre à l'une de ces fêtes, invitée par un certain Clinton, beau gosse et membre du gang, mais sans doute déjà en couple avec une autre fille. C'est alors que la soirée dérape, que la jeune fille et son amie, s'enfuient, poursuivies par des membres dudit gang. L'agression est violente et se déroule le long d'une palissade. Une jeune femme indigène, elle-même d'une famille qui a déjà été aux prises avec la violence, vient de se lever en pleine nuit réveillée par son bébé lorsqu'elle voit l'agression sous ses fenêtres. Elle prévient la police qui intervient pour ne découvrir qu'une tache de sang, coupables et victimes ayant fui. Heureusement, la mère de la jeune fille découvre que sa fille, même si elle a menti et était sortie sans son accord, est blessée et emmenée à l'hôpital. Cet événement va alors déclencher une enquête qui va secouer la communauté amérindienne.
Le roman de Katherena Vermette se veut choral et va donc alterner les différents protagonistes de l'histoire, dans un ordre presque chronologique. L'auteure commence en effet par la scène de l'agression, puis va présenter les préludes à cette soirée et les suites policières de cette violence. C'est l'occasion de montrer la vie quotidienne des Amérindiens. Sans expliquer leur violence et leur culture de gangs, c'est l'opportunité de montrer les blessures qui se perpétuent sur les bases de ce rejet par les communautés intégrées, sur la mise à l'écart des populations autochtones. Le récit est cruel, et il décrit avec un scalpel les doutes et les questions que se pose la communauté, les réactions face au monde dans lequel elle est projetée. Les Femmes du North End est plus un roman psychologique, un texte sur un groupe doublement pénalisé, d'abord parce qu'issu d'une minorité et ensuite (ou avant comme l'on voudra) parce que ce sont des femmes. Sa part policière, stricto sensu, est assez limitée. Quoi qu'il en soit, cela n'enlève rien au plaisir d'une lecture construite avec soin et bien menée.
Citation
Le mot genuine est tatoué sur ses clavicules en grosses lettres presque carrées. Il a un couteau sur le cœur, la lame est brillante, du sang dégouline dessus, le manche est enroulé de fils de tendon, et il y a une petite plume attachée à l'extrémité. Il a aussi un crâne avec une coiffe de plumes d'aigle tatoué sur l'épaule droite, Monias en typo militaire sur la gauche, et Alexandria Angelique, le prénom de sa fille, en lettres sinueuses sur l'avant-bras.