Contenu
Edith, Julie, Jeanne et quelques nouvelles (noires)
Grand format
Inédit
Tout public
Isigny-sur-Mer : L'Aure écarlate, janvier 2021
120 p. ; 20 x 13 cm
ISBN 978-2-955-80512-1
Coll. "101ers"
The lady sings the punk
Comme l'indiquent ses nouvelles déjà publiées, Marion Chemin est très impliquée dans les milieux rock et punk. Ces nouvelles s'en ressentent. Noires, rapides, voire speedées, n'hésitant pas à répandre la fureur et le sang, elles frappent comme autant de coups de poing répétés qui touchent le lecteur en plein estomac. Utilisant sa propre expérience (ou du moins des éléments que pourraient vivre les femmes), elle raconte les amours ratées, les enfants non désirés, les coups du sort et les "vengeances" que pourraient exercer les femmes pour essayer de rétablir la balance de la vie. Il y a dans les histoires comme dans la vie, des orphelinats, des enfants battus, des femmes violées (qui s'en sortent ou pas), des mères de famille inquiètes. Derrière les phrases, même si contrairement à la mode actuelle ce n'est pas indiqué, on entend les riffs de guitare, les basses aux rythmes hypnotiques, des batteries lourdes et des voix ironiques ou mordantes d'un Johnny Rotten ou d'un Joey Ramone. Un Joey Ramone, d'ailleurs, au cœur d'une des nouvelles du recueil, non pas vu dans la saga héroïque de la rock star, mais à travers les yeux d'une groupie qui va le suivre, entrer quelques semaines dans le rock'n roll circus avant d'être débarquée brutalement sans en vouloir à son Joey, car c'est là la dure loi du genre, dans une fin logique et chaotique, comme une chanson des Ramones. 1-2-3-4 et deux minutes trente de bruit et de fureur avant de couper le son et de passer au morceau suivant.
Chaque lecteur pourra apprécier telle ou telle nouvelle selon ses propres goûts, mais aucune ne peut laisser indifférent, Marion Chemin maîtrisant avec force la courte distance, injectant ce qu'il faut, comme autant de petits hymnes rock non boursouflés par les faux semblants ou la technique pour la technique. Edith, Julie, Jeanne et quelques nouvelles (noires) ressemble à ces CD que l'on met en boucle car ils sont toujours trop courts. Le lecteur que je suis conseillerait "Les Jeunes cons" à la fin surprenante. "Elsa je t'aime", portrait d'un salaud ordinaire. "Bébé Lou était une vraie..." pour la description d'une fille-mère un peu différente. "Priscilla, monsieur Serge et son crabe" pour une fin éclatante. "Open space" qui joue avec ironie sur le travail, ceux qui se veulent révoltés et finissent dans le rang ou "Deux minutes d'arrêt" qui clôt le recueil comme un claquement de fin de live, quand les musiciens ne savent plus s'arrêter justement. Mais se limiter à ces textes serait du vice tant les autres sont également de qualité et sonnent justes. Il y a parfois des auteurs qui surjouent leur rage, mais chacune de ces nouvelles sent la violence, le foutre, la hargne, le sang, qui a motivé leur écriture, comme autant de brandons pour brûler le monde qui entoure et qui ne mérite que cela. Comme pour Mozart, la page blanche qui suit un texte de Marion Chemin est encore signée Marion Chemin.
NdR - Le recueil comporte les nouvelles suivantes : "Quand les chiots deviennent des chiens" (Sous les pavés la rage, 2018), "Lisa loves Joey", "Les Jeunes cons (La Souris déglinguée - 30 nouvelles lysergiques, 2012), "Waiting for the sun", "Hélène et le sang" (Bérurier noir - 30 nouvelles noires, 2012), "Elsa, je t'aime" (Bérurier noir - 30 nouvelles noires, 2012), "Michelle", "Bébé Lou était une vraie...", "Priscilla, monsieur Serge et son crabe", "Sans artifice" (Artifices, 2016), "Fin de lignée" (24 nouvelles de l'avent, 2019), "Switchblade Julie", "Saint Expedit", "Open space" & "Deux minutes d'arrêt" (Les Sept œuvres de miséricorde, 2018).
Edith, Julie, Jeanne et quelques nouvelles noires sur le site L'Aure écarlate
Citation
Ce midi, j'ai frappé mon fils. J'ai ouvert mon poing que je tenais serré dans la poche de ma jupe, et c'est parti d'un coup sec. Vlan, cinq doigts sur sa joue fraiche et dodue. Pas un pleur, rien, juste lui qui me juge ne silence, l'air de dire 'Là, maman, tu déconnes.'