Contenu
Poche
Réédition
Tout public
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Anne Le Bot
Paris : 10-18, février 2021
238 p. ; 18 x 11 cm
ISBN 978-2-264-07754-7
Coll. "Littérature étrangère", 5648
Quand le monde devient trop bizarre
Suite à de nombreuses plaintes, Anne Crawford, professeure d'anglais dans la petite ville de Seldom Falls, est mise à pied (en fait elle le croit mais elle a été licenciée). Alors qu'elle reste chez elle, un élève vient au lycée armé et muni d'explosifs et il commet un massacre. Très rapidement, la rumeur court qu'Anne, rageuse de son éviction, aurait aidé le jeune homme. Elle est arrêtée puis libérée car, bien entendu, elle n'est en rien coupable. Mais le mal est fait. Comment se reconstruire après cela, dans une petite ville où le soupçon est passé ? Même si elle peut compter sur son frère, ancien toxicomane repenti, et sur son petit ami Robbie, Anne sombre peu à peu. Elle conserve cependant un regard acerbe qui va lui permettre de décrire la ville, une petite ville de Blancs, sous le choc de cette attaque, et qui peine, elle aussi, à retrouver la vie normale, celle d'avant. Le tout est symbolisé par une idée poétique intéressante : le soleil a disparu, englouti dans le lac local, et la ville survit en multipliant des lumières comme pour créer un soleil artificiel, à tel point que, lorsqu'il revient, personne ne le trouve sympathique.
Le récit de Tom McAllister est éclaté, décalant régulièrement son histoire. Tout ça débute par l'itinéraire du tueur de masse, on passe par une vie résumée des morts qu'Anne connaissait, on détaille les discussions pour savoir comment "commémorer" l'événement et les hurlements quand Anne propose une version vianesque du monument : faire un grand trou, enterrer les armes que les gens possèdent et attendre de voir ce qui pousserait. Par moment, le roman est même un essai sur les peurs, les phobies, le contrôle des armes aux États-Unis ou des passages drôles (qui ont d'ailleurs donné lieu au titre original, "Comment être en sécurité"). L'auteur montre avec ironie la pression des médias, l'idée que pour lutter contre les tireurs dans les lycées il faut armer les professeurs. On a donc à faire à un court roman peu policier, car si le premier chapitre relate les dernières heures du tueur, la suite se concentre sur les pensées et les actions d'Anne Crawford pour essayer de vivre après l'horreur. Entre douceur et amertume, un récit qui n'oublie pas d'être drôle (dans le sens d'ironique) et avec un personnage décrit avec soin, dans sa complexité.
Citation
Comme il a un peu de temps à tuer, le tireur gare sa voiture devant One Brother's Pizza et se dit : Juste une part, une part ne va pas me ralentir. Il se dit : Une part, ça pourrait même me faire du bien.