Un œil bleu pâle

Rien n'était perdu. Les jours du détective étaient comptés. S'il avait tué deux fois et s'il était indirectement responsable de la mort de ces deux prêteurs sur gage serbes, il pouvait parfaitement liquider ce salaud. Cinq cadavres. Qui trouverait un serial killer mort ?
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Roman - Policier

Un œil bleu pâle

Gothique - Enquête littéraire - Assassinat MAJ lundi 09 janvier 2023

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Réédition

Tout public

Prix: 21 €

Louis Bayard
The Pale Blue Eye - 2006
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Jean-Luc Piningre
Paris : Le Cherche midi, janvier 2023
680 p. ; 22 x 14 cm
ISBN 978-2-7491-7635-2

Edgar Allan Poe et ses aventures

Gus Landor a été commissaire de police à New York au début du début XIXe siècle. Malade, il s'est retiré avec sa femme et sa fille à la campagne. Mais sa femme est morte et sa fille est partie. Alors, il vit tranquillement avec ses démons : le départ des deux femmes de sa vie, son goût pour l'alcool ; des démons qu'il chasse en ayant une liaison avec Patsy, une serveuse d'auberge. Une auberge qui a une grande clientèle car elle jouxte West Point, l'une des premières écoles militaires formant les officiers américains. Or justement, c'est le chef de cette institution qui appelle à l'aide Gus Landor. Un des élèves de l'école vient d'être retrouvé pendu. Est-ce un suicide ou un meurtre déguisé ? Le chef veut les impressions d'un policier avant d'aller voir les autorités militaires à une période où West Point joue sa propre survie. Gus Landon vient mais découvre que le corps a disparu. Quelques heures plus tard, on le retrouve mais il a été profané, son cœur ayant disparu... Landor commence donc son enquête qui s'avère difficile car tout le monde a l'air d'avoir quelque chose à cacher. De plus, même s'il séjourne à proximité des suspects, tout est compliqué et le coupable semble se jouer des surveillances, des patrouilles, et se balade dans le camp comme s'il était un des membres officiers qui le commandent. Pour en savoir davantage, le policier a besoin d'un espion au milieu des élèves et il choisit un personnage qui semble jouer avec les codes, un certain Edgar Allan Poe. Ce dernier se pique de poésie mais a un regard pointu sur les êtres et les situations. La relation devient amicale entre les deux hommes, et leur enquête se dirige, suite à la découverte d'indices étranges, vers des pistes sataniques.

Le roman de Lois Bayard avait été publié il y a quelques années chez le même éditeur, mais c'est son adaptation en version cinéma par Netflix, annoncée à grand renfort de publicité comme un grand film gothique, qui est sans nul doute à l'origine de cette réédition en grand format. Mais ce n'est pas forcément uniquement une sortie mercantile. Le roman est bien construit et intelligemment mené, et l'introduction d'Edgar Allan Poe est tout sauf gratuite. Elle permet de lui faire vivre des aventures qui pourraient devenir, de manière déformée, des éléments de sa future œuvre littéraire. Les chapitres finaux révéleront une chute inattendue et amenée avec soin. Le roman en lui-même joue à la fois sur les codes du roman historique, à travers l'évocation des personnages, des lieux et de l'institution militaire ; sur les codes du roman policier puisqu'il s'agit d'une enquête classique, menée avec soin, à la recherche des indices ; sur les codes fantastique et gothique avec cette recherche d'une possibilité satanique, sur la possession (avec entre autres une jeune femme, fille d'un officier médecin et sœur d'un élève, qui commence une relation amoureuse avec Poe et a des vapeurs). De nombreuses scènes jouent sur l'humour, pour contrebalancer la noirceur de ces ombres qui dans la nuit tuent et mutilent, dans un rendu stylistique qui s'apparente aux romans gothiques classiques avec femmes évaporées et mystérieuses, lieux sombres et ténébreux, tueurs qui semblent pouvoir se trouver à plusieurs endroits à la fois, alcool qui trouble les perceptions, personnages qui parlent avec les morts. Un bon roman d'ambiance, ensorcelant...

Citation

Il se mit à tourner autour de moi. Pour tisser sa toile autour du coupable, comme je l'avais fait dans ma chambre d'hôtel avec lui - et avec quantité d'autres auparavant. Sa voix aussi ressemblait maintenant à la mienne ; le ton qui monte et redescend, l'exposition des faits qui élève la tension.

Rédacteur: Laurent Greusard mardi 03 janvier 2023
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