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Inédit
Tout public
Traduit de l'anglais (États-Unis) par François Happe
Paris : Gallmeister, avril 2023
624 p. ; 21 x 14 cm
ISBN 978-2-35178-234-7
Trop près du Diable
Hickney est un ancien soldat qui vit à présent dans le Montana où il est né. Il passe son temps avec son ami, handicapé qui a perdu ses jambes, et la sœur de ce dernier, mère de deux filles qu'Hickney adore. Il a une relation plutôt prude avec cette sœur, même s'il l'aime, car elle est mariée à un Indien qui l'a quittée pour vivre dans une réserve un peu plus loin. Hickney a un petit travail et il économise pour acheter une petite maison en meilleur état que là où il vit. Il espère même convaincre la sœur de son ami de venir y vivre avec ses enfants. Pour survivre, il vivote auprès du shérif. S'il n'est pas lié aux forces de l'ordre, il est chargé de ramasser sur les routes tous les cadavres d'animaux qui se font faucher par des véhicules. Visiblement il y a de quoi faire. À proximité de chez lui, sont venus s'installer des hommes dans un ranch à l'abandon. Des hommes qui vivent dans une ambiance militariste et sont sans doute des survivalistes, ou peut-être des gens qui se préparent à des actions violentes contre le gouvernement. Toujours est-il que leur chef, qui a par le passé été en prison avec le père d'Hickney, vient le rencontrer pour lui offre un complément de salaire. Il s'agit de découper dans les cadavres d'animaux la viande encore bonne et de l'apporter au camp. Hickney accepte mais ne tarde pas à devenir inquiet car, parfois, ces hommes différents, viennent au village, boivent, injurient son ami handicapé. Lorsque, en faisant sa tournée, Hickney tombe sur un homme mort dans la neige, que des hommes du camp arrivent et le prennent tandis que le chef lui demande de se taire, Hickney pense bien que tout ça ne va pas s'arranger. Et quand la sœur de son ami lui demande d'aller à la réserve demander l'aide financière de son ex-mari, il sent bien que là non plus ça ne sera pas une partie de plaisir...
Un Montana sauvage et rude, entre bêtes agonisantes le long des routes, neige et froid qui recouvrent tout, camp de miliciens aux convictions nazies, petites compromissions des gens du coin qui s'épient et se surveillent, et métiers difficiles dans un endroit qui se désertifie. Voilà pour l'environnement et le décor, presque une marque de fabrique pour les éditions Gallmeister. Dans ce paysage, soumis au climat, aux saisons, et à une violence "normale", des hommes tentent de vivre, avec leur morale, leur éthique, parfois juste leur besoin de survivre. On boit beaucoup, on aide d'autres miséreux (ou des chats), on se réfugie dans des solutions bancales et parfois on se bat pour conjurer le sort. Au milieu d'une collectivité qui disparait, sous la menace d'un groupe qui reste caché, il faut essayer de continuer à "fonctionner", à espérer, à penser que les flocons de neige cèderont la place au printemps, que les enfants guériront et que l'on pourra s'acheter une petite maison. C'est dans cette description fine, ce détour sans pathos par des petits riens qui font l'humanité que se construit le roman fort et puissant de Kim Zupan.
Citation
En haut de la montagne, il y a une sorte de redoute rudimentaire en pierre, et là, à l'abri du vent qui souffle en permanence, un homme est assis. Une silhouette solitaire, toute habillée de blanc, au bord du précipice du monde.