Contenu
Grand format
Inédit
Tout public
376 p. ; 21 x 14 cm
ISBN 978-2-37305-726-3
Coll. "Fiction"
Quand tout se délite
Le roman de Julia Colin nous plonge dans un futur proche. Suite à de nombreuses guerres, au réchauffement climatique, à des rebellions internes, la France a sombré dans le chaos. Le gouvernement survit, mais son armée lutte contre les milices qui ravagent le pays, laissant mafia ou groupes armés organiser leurs propres féodalités. Dans un coin de montagne, une vallée, naturellement protégée, dirigée par un maire et sa fille, Saule, fait partie des rares havres de paix de ce futur. Ne peuvent y habiter que ceux qui y résidaient avant les dérèglements ou ceux qui disposent d'un droit de propriété. C'est le cas d'un couple et de leur fille, Calme, dix-sept ans. Avec eux un couple d'amis et leur fils, Élie. Ils ont fui la ville et se sont réfugiés du côté de Massat, non loin de Toulouse. Mais la ville est contrôlée par la mafia et comme Calme est une jeune fille spéciale les relations sont tendues entre elle et les "autorités". Ses parents disparaissent dans des mouvements de foule et de rébellion qui laissent un grand nombre de morts. C'est alors que des adultes survivants décident d'utiliser le titre de propriété de leurs amis et de déclarer les deux enfants comme les leurs afin d'obtenir une place dans la vallée. Là, les choses se compliquent. Pour survivre, tout est hiérarchisé et Élie doit accepter de travailler pour la milice que dirige Saule, une milice composée d'adolescents qui aident tous les habitants en difficulté. De plus, si les nouveaux arrivants sont bien propriétaires, la maison est en ruines et il faut l'aide de tous pour la reconstruire et la rendre habitable. Pour Élie, l'adaptation est difficile car bâtie sur un mensonge. Pendant ce temps, Calme devient de plus en plus bizarre, comme si elle entrait en symbiose avec la nature. Et puis il y a toutes ces vielles légendes autour des sylphes. Et autour de leur vallée protégée, des groupes armés et des gens désespérés ont l'air de passer de manière de plus en plus envahissante.
Avec Julia Colin nous sommes là dans un roman à cheval sur plusieurs genres. Développant une intrigue autour de moments difficiles dans un futur proche, extrapolation des choses déjà présentes, le récit raconte, à travers les yeux d'un adolescent, la vie dans une utopie rurale, un peu rude. S'y ajoute un élément fantastique de taille : la présence d'une jeune fille avec des pouvoirs paranormaux liés à la nature. Tous ces éléments s'imbriquent avec soin, la description d'une utopie quand même rustique, avec des complications logiques - il faut vivre avec la nature et elle n'est pas toujours généreuse, il faut développer l'entraide et ravaler ses propres fiertés, se fondre dans le collectif. Le récit présente des passages obligés du genre, avec des gardes aux "frontières" de la vallée et l'ambivalence : faut-il chasser ou accueillir ? Comment concilier un travail collectif et organisé avec la liberté de chacun. À travers le parcours d'Élie, ses réflexions, ses doutes, ses relations de plus complexes avec une demi-sœur qui devient autre, Avant la forêt est un roman qui peut apparaître facile mais pas enfantin, parfois âpre dans ses descriptions et sachant évoquer les problèmes rencontrés, les difficultés éthiques sans forcer le trait ou devenir manichéen. Le roman de Julia Colin est une bonne introduction pour tous publics à ce genre qui prend de l'ampleur et qui pose la question de savoir comment résister ou accompagner la catastrophe qui s'annonce. Servi par un style limpide, par une façon de raconter qui fait entrer dans les personnages et accepter le côté fantastique de l'histoire, voilà un roman intelligent et bien mené qui devrait pourvoir intéresser tout lecteur.
Citation
Il émergea sur la place, hurlant sans s'en rendre compte de cette séparation forcée, au milieu des hurlements et du brasier, où un des pillards tirait au hasard, les bras levés, menaçant de son arme les habitants du village qui passaient à sa portée pour qu'il lui vienne en aide. Quelques personnes gisaient au sol, blessées, et les suppliques des villageois s'additionnaient à celles des renégats, emmurés vivants par les ronces.