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Corto Maltese : La Reine de Babylone
Grand format
Inédit
Tout public
Paris : Casterman, octobre 2023
180 p. ; illustrations en noir & blanc ; 28 x 20 cm
ISBN 978-2-203-27620-8
Indiana Maltese
En 2021, Martin Quenehen et Bastien Vivés ont repris avec bonheur le personnage de Corto Maltese, imaginé par Hugo Pratt, pour le plonger dans un monde sombre et contemporain avec Océan noir. Les deux hommes continuent l'aventure du marin enchanté dans un monde désenchanté avec La Reine de Babylone. Surtout, ils gardent l'esprit d'Hugo Pratt avec un scénario épuré où l'aventurier croise des personnages extraordinaires dans une histoire où les rencontres paraissent faussement banales. Et ils arrivent à cultiver le terreau de l'ésotérisme et de l'onirisme avec légèreté. Les dialogues sont minimalistes, le dessin épuré (lui aussi) en noir et blanc où l'on reconnait l'univers de Corto Maltese sans être dans un album d'Hugo Pratt. Les pages défilent implacables sous nos yeux. L'histoire débute en Croatie, puis file à Venise avant d'aller dans les Balkans, de faire une halte en Turquie puis de nous projeter en Irak. En cent quatre-vingts pages, le marin fait quasiment toutes les côtes de l'Est méditerranéen. Mais il va y laisser des plumes. La reine de Babylone, c'est Sémira, une jeune femme qui a échappé au carnage de la guerre en ex-Yougoslavie (l'ouvrage propose de multiples flashbacks qui reviennent sur la guerre de 1995), qui a pour pendentif une goupille de grenade (elle s'en expliquera), et qui se ballade au bras de Corto Maltese jusqu'à un yacht où des généraux serbes organisent une petite soirée tout en s'adonnant au juteux trafic d'armes. Ce yacht, Corto et Sémira y retourneront avec le Gangster de Sarajevo pour y braquer un coffre-fort et y croiser des snipers américains. De cette rencontre sanglante découlera une fuite éperdue vers les Balkans, une trahison éhontée, une rencontre avec des gitans, un chantage et une quête au trésor d'Alexandre le Grand au cours de laquelle Corto Maltese perdra un doigt. Cette aventure hybride prend tout son sens quand on lit la bande dessinée. On ne sait pas trop à un moment si on est en compagnie de Corto Jones ou Indiana Maltese (le trouble est augmenté lorsque le marin endosse un uniforme de l'armée américaine appartenant à un certain Jones). Car La Reine de Babylone n'est pas qu'un hommage à l'esprit d'Hugo Pratt, c'est aussi une ode aux fictions d'aventure. Et tous les codes sont ici respectés avec malice. Jusqu'aux cruelles désillusions de Corto Maltese qui ne se départ pas de son flegme cynique mais qui véhicule une profonde douleur. Le marin a du vague à l'âme. Qui s'en plaindra ?
Illustration intérieure
Citation
La vengeance, c'est de la merde mon garçon... Parce que se venger, si on fait ça bien, ça implique fatalement d'aller jusqu'à sa propre mort.