Une sale Française

Jusqu'à 55 ans, il a obéi à son père, à l'Église, à son parti, aux conventions matrimoniales et sociales. Aujourd'hui, la soumission, c'est terminé.
Philippe Laperrouse - L'Affaire Montalet
Couverture du livre coup de coeur

Coup de coeur

La Cité sous les cendres
Dix ans ont passé depuis que Danny Ryan et son fils ont dû fuir Providence et la vengeance d'une fami...
... En savoir plus

Identifiez-vous

Inscription
Mot de passe perdu ?

jeudi 21 novembre

Contenu

Roman - Espionnage

Une sale Française

Social - Guerre - Infiltration MAJ lundi 26 février 2024

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 20 €

Romain Slocombe
Paris : Le Seuil, janvier 2024
268 p. ; 21 x 14 cm
ISBN 978-2-02-155445-8
Coll. "Cadre rouge"

L'homonyme était presque parfaite

À la fin de la Deuxième Guerre mondiale, une certaine Aline Beaucaire se retrouve arrêtée. Dans une longue lettre envoyée à un commissaire de police en 1947, elle va raconter sa vie afin de présenter une version plus sympathique d'elle-même. Jeune femme, ayant un enfant, elle va trouver un mari qui acceptera d'être le père mais qui sera fait prisonnier par les Allemands. Elle part alors travailler en Allemagne, rencontre un Français dont elle s'éprend, qui n'est autre qu'un agent secret au service des Allemands qui va par la suite être envoyé en mission du côté de Marseille pour lutter contre les gaullistes (mais la situation est compliquée car les services de Vichy n'aiment pas ces espions-là). Le couple va franchir la zone de démarcation, dans une opération périlleuse, puis vivre à Marseille où les agents seront finalement arrêtés. Puis ce sera au tour d'Aline. Mais dans cette histoire, il y a aussi Aline Bockert, une Alsacienne, qui s'est engagée activement dès avant la guerre dans le système nazi. Elle deviendra une agente chargée de surveiller et de faire arrêter opposants, juifs et autres réprouvés du système du IIIe Reich. Pendant la guerre, elle travaillera dans des camps de formation pour espions, sur Paris pour des missions, et sans la croiser physiquement, elle se retrouvera parfois aux mêmes endroits que l'autre Aline, ce qui provoquera quelques soucis, certains policiers ne parvenant pas à faire la différence et les confondant et l'on pense à cette scène fabuleuse chez Henri-Georges Clouzot dans Le Corbeau où Pierre Fresnay joue avec une ampoule).

Avec ce nouveau roman de Romain Slocombe, nous nous retrouvons face à deux intrigues qui se superposent. D'une part, la réécriture par l'auteur du mémoire d'Aline Beaucaire pour se dédouaner et, de l'autre, la reconstitution par quelques éléments d'archive de l'itinéraire d'Aline Bockert, dite la panthère rouge. Deux faces que l'on pourrait penser contradictoire ou complémentaire de deux façons de faire, mais tout le talent de Romain Slocombe réside dans les détails. Chaque explication de la jeune femme ballottée par la guerre et naïvement amoureuse peut aussi être interprétée d'une autre façon et les dernières, que nous ne voudrions déflorer, résonneront intelligemment dans ce contexte. Si la trajectoire de Bockert est plus limpide, celle de Beaucaire est plus floue, à l'image de l'époque et de la période. Romain Slocombe offre aussi une vision intéressante de Marseille, des luttes entre familles de gangsters qui, chacune, a choisi un camp, ce qui déterminera les puissants à la sortie du conflit. Il évoque en quelques pages une traversée saisissante de la ligne de démarcation ou la lutte entre vichystes et pro-nazis pour régner sur le monde de l'espionnage en zone sud, montrant ainsi comment l'époque, si elle fut douloureuse pour beaucoup, est aussi l'occasion de plaisirs et d'amusements pour d'autres. Avec ce roman, assez factuel, taillé à l'os, au final renversant, Romain Slocombe continue de décrire sa fascination-répulsion pour la collaboration et la résistance, dans la lignée de sa grande série autour du commissaire Sadorski.

Citation

L'une semblait une vraie garce nazie, l'autre une fille de concierges qui, en des circonstances moins singulières, serait restée une ménagère sans histoires. Toutes deux avaient gagné ce territoire incertain que l'on appelait à l'époque la zone libre. Et l'ombre que répandait l'une éclairait l'autre.

Rédacteur: Laurent Greusard lundi 26 février 2024
partager : Publier dans Facebook ! | Publier dans
MySpace ! |

Pied de page