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Vivre, mourir, renaître
Mathurine est une femme qui a autrefois travaillé pour protéger Darwyne, un enfant handicapé personnage central éponyme du précédent roman de l'auteur. Aujourd'hui, elle continue son métier de travailleuse sociale à la protection de l'enfance. Elle a en charge notamment une jeune fille qui vit seule avec son père. Ce père est aimant mais a peur de mal faire et a préféré placer sa fille en famille d'accueil. Or, cette fille a fugué, officieusement afin de rejoindre son petit amoureux, et s'est noyée accidentellement. Le père est obnubilé par cette mort dont il estime un monstre de la forêt responsable, un monstre qui n'est sans doute d'ailleurs qu'une version fantasmée de Darwyne, devenu dans le meilleur des cas une légende rurale, dans le pire le fantôme d'un enfant mort depuis des années. Mathurine doit donc porter aussi le deuil de cette fille. Et ça contribue à la miner tout en compliquant ses relations avec son propre fils, Wallace, âgé de neuf ans. Elle se met à voir (est-ce réel ou une fiction de son imagination ?) Darwyne. Elle se décide même à le suivre en pleine forêt en abandonnant son fils. Et ce fils, Wallace, va se retrouver lui aussi placé en famille d'accueil, justement dans celle d'où s'est par le passé évadé la jeune fille morte.
Le roman ne joue pas sur la continuité de péripéties et d'aventures. Tout le texte se concentre sur les personnages que nous venons d'évoquer : l'assistante sociale et son fils, Darwyne ou son fantôme, le père et ses remords. Ses personnages oscillent entre rêve et réalité, entre volonté de vivre dans le monde et besoin d'y espérer autre chose, quelque chose de plus grand. Passer par la case forêt, par un retour à la nature, entre bonheur, oubli, et risque de folie, est un moyen de se reconnecter, au milieu d'un monde urbain violent, d'une difficulté à vivre dans les territoires ultra-marins, encore plus délaissés, si cela est possible que nos arrières-cours métropolitaines. C'est dans ce sens que par delà, le polar, Wallace est un roman noir qui s'approche du gothique, lorgne du côté du social et parle de notre monde. Colin Niel continue ainsi son œuvre qui décrit une Guyane au cœur de ses préoccupations.
Citation
Beaucoup auraient foulé cet humus-là sans marquer la moindre pause, pressés de retrouver la ville avant que n'arrive la nuit. Mais pas Tiburce qui, fusil en bandoulière et machette en main droite, s'accroupit au-dessus des feuilles, et lit le sol brun comme un registre éphémère, un ouvrage où dans une écriture d'avant l'écriture seraient consignés les plus récents mouvements des faunes.