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Grand format
Inédit
À partir de 9 ans
Saint-Herblain : Gulf stream, mai 2010
288 p. ; illustrations en noir & blanc ; 22 x 15 cm
ISBN 978-2-35488-077-4
Coll. "Courants noirs"
Une superbe espérance
En juillet 1936, Esteban et sa mère fuient les désordres de la guerre civile en Espagne. En prenant le train, ils se retrouvent séparés. Esteban et sa sœur, qui entretemps l'a rejoint, se demandent comment retrouver leur mère dans un pays en guerre, surtout que le conflit va leur révéler, à eux paysans des montagnes, de nouvelles façons de voir le monde et les rapports entre les êtres.
Le but de la collection "Courants noirs" est de présenter un épisode historique à travers une intrigue policière et d'aventures. Comment apporter les informations historiques essentielles ? C'est toujours un défi pour l'auteur. Ici, Lilian Bathelot s'en sort d'une façon honorable en utilisant une double technique. D'une part le roman est construit par une suite de lettres que s'écrivent les protagonistes et qui permettent à la fois de s'implanter dans leur psychologie, de voir les événements avec leurs propres naïvetés et découvertes, et de développer les éléments en les décrivant pour un correspondant qui, par principe, ne les connait pas. D'autre part les lettres sont trouvées dans un coffret par une historienne qui peut ainsi éclairer quelques points obscurs pour le lecteur par des notes de bas de page. Pas une seule seconde le procédé n'apparait ici artificiel. De même dans le corps de son récit, les sympathies naturelles de l'auteur ne sont pas assénées mais intégrées à travers les détails de comportement de personnages : un curé, proche des Franquistes, s'oppose à un ancien séminariste défroqué qui a choisi d'appliquer les Évangiles en se mettant du côté des pauvres. Plutôt que de les engluer dans de longs discours, on voit passer la nuit des miliciens. Ils entrent chez le curé, repartent, et le lendemain, le corps pantelant du séminariste est jeté, mort, d'une voiture.
Le roman ne sombre pas néanmoins dans le manichéisme. Coincés dans Barcelone, les héros se trouvent confrontés bien entendu aux Franquistes, mais également aux luttes débutantes entre les Républicains modérés et les forces plus à gauche qui veulent mettre en place l'autogestion. Cela donne l'occasion à une scène magnifique où des pauvres se ruent pour détruire une banque ; ils prennent les billets pour les brûler car c'est là la vraie liberté... De même nous assistons aux premiers pas de bordels autogérés par leurs propres pensionnaires... À cet égard, une des premières scènes du livre évoque la séparation entre la mère et son fils. La mère semble sauvée par un cavalier qui l'entraine hors du train. Mais ce sauveur n'en sera pas un, permettant les rebondissements qui éclaireront alors les raisons de cette révolution et de son espoir.
Vue à travers les yeux des "innocents" qui traversent l'Histoire et tentent de se frayer une destinée au sein d'une situation terrible, L'Étoile noire raconte une période troublée de manière extrêmement vivante, nous faisant partager les envies et les doutes d'un peuple, sans jamais sacrifier les qualités littéraires du récit.
Citation
C'étaient des femmes qu'ils avaient vendues. Et le différend portait sur leur valeur respective, car le prix convenu avec les acheteurs correspondait à l'ensemble du lot.