Le Nom de la Rose

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vendredi 19 avril

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Roman - Thriller

Le Nom de la Rose

Historique - Tueur en série - Religieux MAJ lundi 12 mars 2012

Note accordée au livre: 6 sur 5

Grand format
Réédition

Tout public

Prix: 22,9 €

Umberto Eco
Il Nome della Rosa - 1980
Traduit de l'italien par Jean-Noël Schifano
Paris : Grasset, janvier 2012
616 p. ; 23 x 16 cm
ISBN 978-2-246-79784-5
Coll. "Roman"

Querelles théologiques

Avec Le Nom de la Rose, son premier roman, Umberto Eco avait injecté un sang neuf dans le genre du policier historique. Mettant en scène un enquêteur du Moyen Âge, sorte de Sherlock Holmes avant l'heure, il avait signé un livre novateur. Il propose aujourd'hui, une édition débarrassée de ses scories, modifiée et enrichie d'une apostille.

Guillaume de Baskerville, un ancien inquisiteur, accompagné d'Adso de Melk son jeune secrétaire, arrive dans une abbaye bénédictine sise sur un nid d'aigle, entre Provence et Ligurie. Il est chargé d'une mission diplomatique au nom de l'empereur et doit rencontrer nombre de ses frères en religion.
Mais sa venue coïncide avec une situation maléfique qui empoisonne l'atmosphère de l'abbaye. L'abbé Abbon, s'appuyant sur sa réputation, lui demande son concours. Le corps d'un moine enlumineur a été retrouvé déchiqueté au bas de la falaise. Le point de chute permet d'écarter tout accident. L'idée du suicide est écartée. Il ne reste que l'assassinat. L'attitude de l'abbé laisse supposer qu'il a connaissance d'éléments mais ne peut les exprimer.
Le lendemain, c'est le corps d'un copiste et traducteur de grec qui est retrouvé dans la cuve du sang qui devait servir à faire le boudin. Les événements semblent liés à la bibliothèque, une pièce maitresse qui fonde la réputation de l'abbaye par le nombre et la richesse de son contenu. Toutefois, ce lieu est inaccessible à tout autre que le bibliothécaire et son aide.
Dans ce lieu de prière, dans ce havre de sérénité, la peur, et tous ses corollaires, s'installe... Et les meurtres continuent !

Umberto Eco propose un roman fleuve qui relève d'un mystère médiéval, de l'atmosphère d'un thriller. L'auteur multiple les signes, les symboles, les exposés de philosophie médiévale et de réflexion sur la religion. Il illustre un combat contre l'obscurantisme et délivre un plaidoyer pour l'accès au savoir et à la liberté. Il inscrit son intrigue dans une période où la chrétienté est divisée entre l'autorité papale et celle de l'empereur du saint Empire, alimentée par un conflit théologique. Les franciscains s'opposent au Pape et à la curie au sujet de la pauvreté du Christ, les premiers défendant l'idée d'un retour du clergé vers plus d'humilité et de tempérance.

Il mène son récit en sept jours, nombre hautement symbolique, et donne à son enquête le tempo des heures liturgiques. Il nourrit son roman d'éléments de thriller avec la mise en scène d'un véritable assassin en série. Cependant, le mobile de celui-ci trouve ses racines dans l'évolution de la religion, dans la lutte entre différents courants, qui masque une guerre politique entre le pape et l'empereur.

L'auteur décrit, avec une érudition révélée par ce livre, un Moyen Âge croyant, ne pouvant faire fi de la religion et de son omniprésence dans la vie sociale et politique, dans l'existence quotidienne.

Il enrichit son livre de multiples références. Son enquêteur, le franciscain Guillaume de Baskerville emprunte à Conan Doyle et à Guillaume d'Occam, un philosophe, logicien et théologien anglais. Il fait citer par son héros, à de nombreuses reprises, Roger Bacon, un des pères de la méthode scientifique, surnommé Le Docteur admirable, tant ses connaissances étaient prodigieuses.
Il introduit, sous le personnage d'un vénérable moine, Jorge Luis Borges, un écrivain et poète argentin. La bibliothèque, une des pièces maitresses de l'intrigue est inspirée par La Bibliothèque de Babel, décrite par le même Borges dans Fictions.

L'auteur livre une histoire documentée, d'une grande beauté, d'une richesse qui mérite le détour. J'invite tous ceux qui ont vu l'excellent film que Jean-Jacques Annaud en a tiré, à plonger dans le roman. Sans remettre en cause le talent du cinéaste, celui-ci s'est essentiellement attaché à la partie thriller, occultant par nécessité, tout ce qui fait la beauté et la richesse du livre, tout ce qui décuple l'intérêt pour cette enquête de type policier.

Umberto Eco livre nombre de réflexions sur la période, sur le rôle de l'Église, des confréries, sur l'art et son usage à l'époque, sur l'objectivité scientifique ou la subjectivité de la foi religieuse. Il explique toutes les subtilités des différents courants religieux qui bouillonnent et se confrontent. Il rend attractives des analyses sur la causalité, des digressions érudites sur les livres de l'époque, les idées défendues par des congrégations...

Voici ce que dit l'auteur à propos de cette nouvelle version : "Les modifications éparses et variées n'en changent ni la structure narrative ni le style – qui est celui d'un chroniqueur du Moyen Âge. Certaines répétitions, adjectifs ou incises inutiles ont été éliminés. De rares bévues ont été corrigées par exemple traduire cicerbite (qui est une sorte de chicorée) par courge alors qu'elle n'était pas encore connue.
Le latin était et demeure fondamental pour conférer à l'histoire sa saveur conventuelle. Cependant, certains passages, où les citations nécessitaient l'emploi d'un dictionnaire et nuisaient à la fluidité du récit, ont été modifiés.
Pour le reste, il s'agit de variations faites non tant au profit du lecteur qu'à mon profit à moi de relecteur, pour que je me sente stylistiquement plus à mon aise..."

Cette réédition est l'occasion d'entrer dans un livre éblouissant de verve, d'humour, de virtuosité narrative, avec une matière romanesque d'une opulence peu commune.

Citation

Il n'est qu'une seule chose qui excite les animaux plus que le plaisir, et c'est la douleur. Sous l'effet de la torture tu vis comme sous l'empire d'herbes qui donnent des visions. Tout ce que tu as entendu raconter, tout ce que tu as lu te reviens à l'esprit, comme si tu étais transporté, non pas vers le ciel, mais vers l'enfer. Sous la torture tu dis non seulement ce que veut l'inquisiteur, mais aussi ce que tu imagines qui peut lui être agréable...

Rédacteur: Serge Perraud lundi 05 mars 2012
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