L'Expatriée

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Roman - Noir

L'Expatriée

Psychologique - Huis-clos - Assassinat MAJ mardi 12 mars 2013

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 17,9 €

Elsa Marpeau
Paris : Gallimard, février 2013
258 p. ; 23 x 16 cm
ISBN 978-2-07-013964-4
Coll. "Série noire"

Actualités

  • 14/06 Prix littéraire: Sélections 2013 des Grands Prix de la littérature policière
    Mercredi 12 juin s'est tenue à la BiLiPo une rencontre des jurés du Grand Prix de la littérature policière afin de dévoiler les deux sélections finales ("Roman francophone" et "Roman étranger"). Au cours de cette réunion, un hommage particulier à été rendu à Jean-Jacques Schléret, récemment décédé, membre du jury. En attendant les noms des lauréats, qui seront connus des jurés après la délibération finale du mardi 17 septembre 2013, voici le détail des sélections. Il est à noter que chaque sélection propose son lot de surprises, mais qu'il y a de toute évidence une plus grande diversité éditoriale dans la sélection francophone. Ainsi, l'on dénombre des ouvrages de chez Serge Safran, de La Manufacture de livres ou des éditions La Branche dans les "Romans francophones", alors que les "Romans étrangers" s'octroient des ouvrages de chez Liana Levi ou Baker Street. Mais les éditeurs qui sont les grands gagnants sont Rivages, Gallimard et Gallmeister. Les grands perdants sont à coup sûr Calmann-Lévy, Le Seuil et Actes Sud (même si l'on dénote un roman paru aux éditions Jacqueline Chambon, qui entretiennent un lien privilégié avec la maison fondée par Hubert Nyssen). Mais foin de forfanteries, les sélections !

    Romans français :
    - Rainbow Warriors, de Yal Ayerdhal (Au Diable Vauvert) ;
    - La Fille de Hahn Hoa, de Thomas Bronnec (Rivages, "Noir") ;
    - Ne lâche pas ma main, de Michel Bussi (Presses de la Cité, "Domaine français") ;
    - L'Assassin à la pomme verte, de Christophe Carlier (Serge Safran) ;
    - Un long moment de silence, de Paul Colize (La Manufacture de livres) ;
    - Des nœuds d'acier, de Sandrine Collette (Denoël, "Sueurs froides") ;
    - Le Dernier des treize, de Mercedes Deambrosis (La Branche, "Vendredi 13") ;
    - I Cursini, d'Alix Deniger (Gallimard, "Série noire") ;
    - L'Expatriée, d'Elsa Marpeau (Gallimard, "Série noire") ;
    - Les Nuits de Patience, de Tobie Nathan (Rivages, "Thriller") ;
    - Un homme effacé, d'Alexandre Postel (Gallimard, "La Blanche") ;
    - J'ai fait comme elle a dit, de Pascal Thiriet (Jigal, "Polar") ;
    - Le Dernier Lapon, d'Olivier Truc (Métailié, "Noir") ;

    Romans étrangers :
    - Boulevard, de Bill Guttentag (Gallimard, "Série noire") ;
    - Les Mères, de Samantha Hayes (Le Cherche midi, "Thriller") ;
    - Lettres de Carthage, de Bill James (Rivages, "Thriller") ;
    - Dark Horse, de Craig Johnson (Gallmeister, "Noire") ;
    - 22/11/63, de Stephen King (Albin Michel, "Romans étrangers") ;
    - Le Royaume des perches, de Martti Linna (Gaïa, "Polar") ;
    - Une belle saloperie, de Robert Littell (Baker Street) ;
    - Il faut tuer Lewis Winter, de Malcom Mackay (Liana Levi, "Policier") ;
    - Traversée vent debout, de Jim Nisbet (Rivages, "Thriller") ;
    - Le Tueur se meurt, de James Sallis (Rivages, "Thriller") ;
    - Dernière nuit à Montréal, d'Emily St. John Mandell (Rivages, "Thriller") ;
    - Cuba libre, de Nick Stone (Gallimard, "Série noire") ;
    - Impurs, de David Vann (Gallmeisterr, "Nature writing") ;
    - Lumière dans une maison obscure, de Jan Costin Wagner (Jacqueline Chambon, "Roman policier") ;
    - Pike, de Benjamin Whitmer (Gallmeister, "Noire").
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Comment fuir soi-même

Juste avant la Première Guerre mondiale, la France a vu se développer une littérature coloniale qui vantait les bienfaits de notre civilisation et son implication dans les contrées lointaines. Aujourd'hui, ce genre a pratiquement disparu et les écrivains sont souvent restés très franco-français, voire parisianistes. Elsa Marpeau décide d'évoquer nos nouveaux "coloniaux", les Français qui, pour diverses raisons, notamment professionnelles, s'expatrient vers des contrées qu'ils espèrent riantes. Dans L'Expatriée, c'est Singapour où tandis que le mari va développer son affaire, la narratrice essaye d'écrire un livre. Mais les expatriés vivent dans des immeubles, ensembles, coupés du monde réel, vivant en vase clos, où chaque détail devient vite une rancœur, chaque goutte d'humidité se transforme en moisissure destructrice. Aussi lorsque l'un d'eux est retrouvé mort, les soupçons vont beau train et Elsa, qui était devenue l'amante de la victime, se transforme en suspecte toute désignée. Elsa (tiens, tiens...) Marpeau reconstitue alors avec soin et en quelques lignes le sentiment d'oppression, la lourdeur, la moiteur, le poids des groupes sociaux bloqués et figés, symbolisés par de nombreuses scènes se déroulant autour de la piscine réservés aux Européens qui s'inscrit dans la résidence.
Afin de renforcer encore les sensations d'enfermement, Elsa Marpeau greffe sur son intrigue principale une seconde qui renvoie à la même thématique traitée de manière différente : les expatriés vivent en patrons coloniaux, utilisant des domestiques (Singapour oblige, il s'agit de Philippines) qui sont presque des esclaves. Aussi, lorsque la domestique d'Elsa montre qu'elle détient des preuves qui pourraient impliquer sa patronne dans le meurtre, la jeune femme est bien obligée d'aider sa domestique, dans une inversion maître/domestique en une version féminine du film réalisé par Joseph Losey en 1963, The Servant.
À cette histoire qui permet des développements intelligents et fins - qui piège réellement qui ? Qui est l'assassin ? Le mari est-il au courant ? Le mort est-il aussi franc que l'on pouvait le croire ? -, Elsa Marpeau ajoute une couche qui fait perdre les repères du lecteur comme une expatriée perdant ses repères dans ce faux univers qu'est la résidence pour Occidentaux. Par une description psychologique fouillée et crédible, les personnages ne sont jamais réellement ce qu'ils prétendent être. C'est ainsi qu'Elsa est une jeune femme au bord du gouffre, que son mari l'aime et en sait sans doute beaucoup plus qu'on ne le croit, et que les amies d'Elsa lui en veulent. Tout n'est que simulacre et désœuvrement, rendu par un style qui sans insister, joue sur l'enfermement, le lieu clos, les routines et leurs légères dérives, dans la filiation des meilleurs roman de Pierre Boileau et Thomas Narcejac.

Nominations :
Prix Landerneau Polar 2013
Mille et une feuilles noires 2013
Prix Mystère de la Critique 2014

Citation

Je suis juste moins lâche que toi. Tu as peur de tout. De la mort, de tes désirs, de tes colères. J'ai juste laissé éclater ta rage.

Rédacteur: Laurent Greusard jeudi 27 juin 2013
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