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jeudi 28 mars

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Roman - Noir

Pas de littérature !

Pastiche - Enquête littéraire - Gang MAJ mardi 22 mars 2022

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 19 €

Sébastien Rutés
Paris : Gallimard, mars 2022
252 p. ; 21 x 14 cm
ISBN 978-2-07-295476-4
Coll. "La Noire"

Centon de solitude

L'histoire débute en avril 1950. Grégoire Centon est un imposteur de première qui a convaincu la Série Noire qu'il était traducteur alors qu'il ne fait que rajouter des tonnes d'argot aux traductions irréprochables de Gisèle, sa femme. Mais Grégoire va aussi se convaincre qu'il peut écrire son roman, le premier roman policier français qui sera publié à la Série Noire. Un Américain rencontré dans un troquet lui parle d'un manuscrit de Villon qui aurait refait surface. Et Grégoire Centon, esseulé, de se retrouver dans une situation difficile, voire rocambolesque : il devient un pion dans une guerre picrocholine entre le Sachem (un avatar du Pacha qui aime Rabelais)) et le mal-surnommé Jo le Chanceux. Le premier est lettré, le second joue les gros bras armés. Le premier est courtois, le second est courtaud. Le premier cite Villon et Vidocq, le second cause la poudre, et pas d'escampette. Grégoire Centon se mue en enquêteur à la recherche d'un ancien collabo censément mort mais toujours en vie. Puis, il se fait enlever par des parties diverses mais toutes du même côté de l'illégalité. Il doit écrire les mémoires du Sachem, il doit ne pas écrire de mémoires. Il croise un Annamite et Dizzie Gilespie, et se confronte à un monde en mutation dans lequel l'imposture est une posture. Surtout, il joue serré entre deux conflits dont il voudrait bien être étranger : une guerre des gangs sur fond d'évolution du trafic de drogue et une guerre idéologique entre l'Est et l'Ouest. Le roman de Sébastien Rutés est truculent, et il incombe de le prendre pour ce qu'il est : un pastiche malicieux du genre, une mise en abyme de l'enquête littéraire en même temps qu'une ode à l'amour d'une certaine littérature. Sébastien Rutés, qui écrit à "La Noire" chez Gallimard, avait déjà rendu hommage au Salaire de la peur avec Míctlan, son roman précédent. Ici, il s'émancipe et s'affranchit encore plus en rendant un roman joliment irrévérencieux et au style impeccable pour mieux cacher sa propre imposture d'écrivain absolument pas raté. Quant à son héros, Grégoire Centon, il n'est toujours pas remis de ses dernières surprises.

Citation

Prendre en chasse un traducteur littéraire ne requiert pas beaucoup de discrétion, devait-il croire. Un traducteur de poésie, je ne dis pas, mais je traduisais pour la Série Noire. Aussi théorique soit-elle, je tenais ma science de la filature des détectives américains, les meilleurs, et j'avais aussi appris comment fausser compagnie à mes poursuivants.

Rédacteur: Julien Védrenne vendredi 11 mars 2022
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