Harlem Shuffle

Je rembobine onze mois plus tôt. En commençant par la séance des présentations lorsque j'ai croisé son regard envoûtant et dangereux pour la première fois. Toutes ces heures passées à tremper dans la piscine et à mettre les cours en pratique sur le récif artificiel du centre.
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jeudi 25 avril

Contenu

Roman - Noir

Harlem Shuffle

Social - Braquage/Cambriolage - Urbain MAJ jeudi 05 janvier 2023

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 22,9 €

Colson Whitehead
Harlem Shuffle - 2021
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Charles Recoursé
Paris : Albin Michel, janvier 2023
420 p. ; 21 x 14 cm
ISBN 978-2-226-46151-3
Coll. "Terres d'Amérique"

Le roi de la débrouille et le prince de la dérouille

1959. Ray Carney, marié, père de famille, vendeur de meubles et d'électroménager sur la 125e Rue à New York, arrondit ses fins de mois en recelant quelques menus objets. Des larcins ordinaires qui n'en font pas forcément un mauvais bougre. D'ailleurs, il serait plutôt à classer du côté des honnêtes gens. Tout le contraire de son cousin Freddie. Lui, c'est un bon bougre mais il a une fâcheuse tendance à s'acoquiner avec des gars louches, et surtout n'hésite pas à commettre des braquages. C'est lui qui branche Carney sur le casse de l'Hôtel Theresa à Harlem. Une idée de Miami Joe, gangster au costard violet. Ça aurait dû l'alerter. Ça et le fait que son cousin est un poissard de première. Car Miami Joe tente de se faire la malle avec le butin en buttant au passage un de ses anciens associés. Mais (mal)heureusement, Pepper veille au grain. Vétéran de la Seconde Guerre mondiale, ami et complice du père de Carney (un gangster comme on n'en fait plus), l'homme n'est pas bavard sauf avec un feu. Et il tient au code de l'honneur des gangsters. Entre les deux hommes survit quelque chose du passé. Carney hésite entre une petite vie honnête et paisible, et continuer ses petits arrangements avec la Loi, sa conscience et ses silences envers sa femme Elizabeth (qui travaille dans une agence de voyages qui propose aux Noirs des voyages en toute sécurité dans une Amérique gangrenée par le KKK). Il apprend auprès d'un receleur à déceler les bons bijoux et les pierres qui ont de la valeur. Il fait équipe avec une prostituée pour se venger d'un homme que tous deux abhorrent. Il rencontre le descendant du premier maire de la Pomme verte. Il croise quelques gangsters féroces et d'autres en col blanc. Des Blancs en col blanc. Les plus dangereux surtout quand comme Ray Carney on est Noir. Surtout qu'au même moment, downtown se révolte car un adolescent noir a été tué par un flic blanc de trois balles. Cette fois c'est sûr ça va changer.

Concentrant trois romans en un, sur une période de cinq ans, Colson Whitehead continue d'arpenter la sombre histoire des Noirs dans l'Amérique raciste et ségrégationniste. Son intrigue, contemporaine de celle de Nickel Boys, son précédent roman, auréolé du Pulitzer emprunte plus à l'hommage revendiqué de Chester Himes et de Donald Westlake. Elle s'installe donc à New York. Harlem. Avec ses proxénètes, ses tripots qui ne paient pas de mine, ses flics blancs corrompus qui font la queue pour leur enveloppe, ses truands qui monnaient leur assurance et ses Noirs qui s'essaient à instaurer une société à l'image des Blancs, et pour qui la réussite n'a pas de prix. Un temps, Carney rêvera d'intégrer le Club Dumas. Il se fera arnaquer avant de se venger puis d'arriver à ses fins. Car le roman de Colson Whitehead est un roman sur la trahison, la vengeance, l'amitié et surtout la lutte pour les droits civiques des Noirs. La construction est aussi habile que les coups sont tordus. L'écriture prend un malin plaisir à décrire des situations crues réalistes et pourtant, souvent, incongrues comme ce gangster qui offre des tables à ses petites amies et qui bénéficie d'une ristourne de dix pour cent chez Carney. En filigrane, l'histoire de cette ville qui est en train de construire le World Trade Center avec l'idée qu'une ville se meurt, qu'une autre prend sa place et qu'il vaut mieux parfois être le second que le premier. En quatre cents pages d'une truculence cynique, Colson Whitehead dépeint l'Amérique contrastée, et nous offre un perdant magnifique.

Citation

Un policier blanc avait abattu un jeune Noir de trois balles dans le corps. Le savoir-faire américain dans toute sa splendeur : on crée des merveilles, on crée de l'injustice, on n'arrête jamais.

Rédacteur: Julien Védrenne jeudi 05 janvier 2023
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