Londres, 2003. Gilbert Woodbrooke est aux anges comme rarement il ne l'a été. Mais vous connaissez le personnage, pour lui le bonheur dure rarement et le destin frappe fort : sa sœur est victime d'un attentat à la bombe dans le métro. En lui rendant visite à l'hôpital, il se retrouve rattrapé par son passé (une vieille dette trainant de Sexy New York) et la police. Il ne doit son salut qu'à une vieille connaissance (une sortie d'hôpital qui lui coûtera la vésicule !), et le voilà envoyé par son ex-galeriste Julius B. Hacker comme juré du Festival international du film trash à Lyon. Il se rend donc en France, animé par le désir de retrouver les traces de son grand-père, journaliste anglais ayant eu une certaine célébrité entre les deux guerres pour ses articles et interviews d'hommes célèbres (Gandhi, Mussolini, Hitler…).
Comme souvent, les pérégrinations de Gilbert Woodbrooke sont l'occasion pour Romain Slocombe de fouiller des pans entiers de l'Histoire. Avec ses habituels changements de registres et d'époques, ce roman mêle les extraits de films (celui de Julius B. Hacker), de journaux (celui du grand-père de Gilbert), de livres (celui de Gabrielle Pierremont)… et s'intéresse – entre autres – à l'extermination des juifs polonais, au plan « Fugu » des Japonais pendant la Seconde Guerre mondiale… Rien n'est laissé au hasard (l'auteur s'en explique en pré- et postface), et le projet, une fois de plus, frappe par sa maîtrise et sa conduite (même si le final avec Gilbert est en dessous du reste). Revenant à Lyon, qu'il avait déjà brillamment exploré avec Mortelle résidence, Romain Slocombe y pose une intrigue parfaitement menée. C'est un des grands romans de ce début d'année – mais qui ne peut s'apprécier qu'en ayant lu au minimum les deux premiers volets de la trilogie « L'Océan de la stérilité », voire la première tétralogie consacrée à Gilbert.