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Inédit
Tout public
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Shannon Burke, Shannon Burke
Paris : Sonatine, mai 2014
208 p. ; 21 x 14 cm
ISBN 978-2-35584-253-5
Sauveteur à sauver
Devant l'horreur de certaines scènes ou de certaines situations, l'une des ressources de l'être humain est de rire. On connaît l'humour des médecins alors pourquoi celui des ambulanciers serait-il différent ? Avant de devenir scénariste et écrivain, Shannon Burke a été ambulancier, et il ne fait aucun doute que son passage dans l'univers du 911, le numéro d'appel des ambulanciers, a été l'occasion d'avoir un regard acéré et des anecdotes variées qui vont ponctuer ce roman.
Les secours ont cédé aux charmes du capitalisme. Si au départ, leur raison d'être est de sauver des vies, aujourd'hui, par souci de rentabilité, il faut choisir qui on doit sauver en priorité. Devant cette impression de remplacer Dieu, on en vient vite à se poser la question de savoir si l'on doit sauver telle ou telle personne qui après tout ne mérite peut-être pas de vivre comme, par exemple, ce trafiquant de drogue. Les pires questions viennent perturber le quotidien : cela vaut-il le coup de sauver la vie d'un nourrisson sans doute infecté par le SIDA ?
Ollie Cross qui peine sur ses études de médecine et sur sa relation amoureuse accepte d'entrer dans le corps des ambulanciers dans un quartier difficile de la ville de New York. Il est persuadé qu'il va apprendre des choses, se perfectionner pour ses études et, avec l'argent gagné, rafistoler sa vie personnelle et professionnelle. Mais il se trouve confronté au monde avec un équipier qui alterne des périodes agréables et des moments de doute quand il ne se prend pas pour Dieu le père, une administration qui ne se pose pas de questions excepté lorsque des retombées désastreuses pourraient remonter jusqu'à elle, et son univers personnel qui s'effiloche. Quand ce dernier s'effiloche, la seule ressource qui reste, c'est de s'accrocher encore plus à l'amitié, à la franche camaraderie entre collègues. Les ambulanciers sont entre eux aussi soudés que les policiers, les pompiers et les militaires...
Nous sommes là à la limite du roman, entre le long reportage un peu fictionné et le récit autobiographique à la troisième personne. Shannon Burke dessine avec réalisme une suite de vignettes concentriques qui recoupent l'enfermement de son héros. Il se trouve au départ une alternance de scènes avec sa compagne, ses études et son nouveau travail, puis, peu à peu, le travail devient obsessionnel, occupe tout l'espace, fait disparaître les références morales dans le bouillon de l'instant, la réaction à chaud, pour finir sur une note optimiste qui n'apparait pas plaquée mais simplement finale, celle qui donne la tonalité juste à l'ensemble : une histoire, très américaine, pleine de doute et de rédemption, de pêchés et de sauvetages.
Citation
Lorsque plus rien n'a de sens, y compris la vie et la mort d'autrui, vous n'êtes plus qu'à un pas du mal. Et ce putain de pas est terriblement facile à franchir.