Le Dernier dinosaure

- Comment le reconnaître ?- Au frisson qui vous mordra l'échine, v'la comment vous l'trouverez. L'a une tronche qu'est pas Dieu possible, une tête à faire pleurer la marmaille et baisser les yeux des femmes en espérance d'enfant.
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Roman - Noir

Le Dernier dinosaure

Politique - Trafic - Complot MAJ mardi 10 décembre 2019

Note accordée au livre: 3 sur 5

Poche
Inédit

Tout public

Prix: 13 €

Pierre Willi
Pau : Cairn, septembre 2019
390 p. ; 18 x 12 cm
ISBN 978-2-35068-768-1
Coll. "Du noir au Sud", 78

Les damnés du bitume

Patron à l'ancienne d'une entreprise de transports routiers au long cours vers les pays de l'Est ou l'Orient, Emil Javek tente de survivre entre les traites, les camions de plus en plus décrépits, Mireille, sa femme alcoolique tentant de tenir sa comptabilité... Il ignore qu'il est déjà dans le collimateur de Médéric, un trafiquant sanctionné par la raison d'État et la realpolitik, en quête d'une cargaison perdue – et qui joue lui-même sa peau dans l'affaire. Mais qui peut bien avoir tué Léon, le placide Terre-Neuve de Javek ? Serait-ce pour s'approcher d'une cargaison ? Pourtant, les meurtriers sont repartis les mains vides, et le camion en partance ne contient que d'inoffensifs nains de jardin. Javek ignore qu'il est mêlé malgré lui à des affaires dépassant largement le transport et qui ont à voir avec la sûreté de la nation, voire les magouilles barbouzardes. Trahi de partout, il lui faudra aller jusqu'au Bosphore pour tenter de sauver ce qui peut l'être à commencer par son entreprise. Et peut-être bien sa vie...
Un roman qui part d'un métier rarement utilisé dans le polar actuel, celui des routiers, généralement limité à quelques clichés (les vieux de la vieille se rappelleront de la série du "Trucker" d'Alan Floor en "Spécial-Police", qui avait au moins l'avantage de connaître ce milieu). En cela, Pierre Willi rejoint les romans et films d'aventure exotique des années 1970 : on imagine facilement des Lino Ventura ou Michel Constantin dans une adaptation fantasmatique de ce roman d'hommes... Même si le chien Léon peut difficilement ne pas être un clin d'œil à certain "Pied de porc de la Sainte-Scolasse", fréquenté par un certain Gabriel Lecouvreur ! Sans donner dans les effets flash de pseudo-séries télévisées, la narration passant d'un personnage à l'autre maintient le mystère et l'intérêt, et si on développe la vie quotidienne de ce patron et de ses hommes, on sent la puissance du vécu. Un aperçu d'un mode de vie exotique avec ses heurs et malheurs dans lequel se cache un bon roman dépaysant, tout simplement, servi par une langue d'une fausse simplicité qui se permet quelques notations fort justes. On ne regardera plus de la même façon le camion derrière lequel on traîne...

Citation

Javek était un type borné qui prétendait vivre ses rêves dans un monde où seul le réalisme pragmatique vous autorise quelque chance de succès. Javek était de la race des dinosaures. Fabien se défendait de le trouver sympathique. Il savait que par un effet miroir Javek lui renvoyait sa propre image : celle de l'obsolescence programmée. Ils étaient tous les deux d'un autre temps, inadaptés, cherchant désespérément à garder leur place dans un monde qui les refusait.

Rédacteur: Thomas Bauduret mardi 10 décembre 2019
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