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Hollywood and Blood
Cela dure depuis les débuts du cinéma. Derrière le glamour, se cachent les manœuvres d'une entreprise qui jette ceux qui ne sont plus rentables. C'est donc ça l'envers d'Hollywood ? La drogue, l'alcool, les scandales, les suicides, les meurtres, la puissance des moguls, de la presse et de la mafia ? C'est vrai que lorsque le cadavre de la star est découvert, on appelle d'abord le patron du studio et après la police ! Philippe Margotin revient sur les grands scandales judiciaires...
Philippe Margotin (à ne pas confondre avec Phillip Margolin, l'auteur de thrillers américains) est un "rock writer" qui a publié des livres sur des têtes d'affiche (Muse, U2, The Rolling Stones, The Police, Amy Winehouse, The Who, Radiohead mais aussi nos Johnny et Polnareff nationaux). Le voilà qui délaisse la musique pour ajouter sa pierre au tombeau d'Hollywood. La couverture de son livre, à l'inévitable typo "courrier-machin-à-écrire-ruban-encreur-usé" annonce les affaires Elizabeth Short (dite "le Dalhia Noir" immortalisée par James Ellroy), Bugsy Siegel (le mafieux), Marilyn Monroe, Sharon Tate, Robert Kennedy, Natalie Wood, Marvin Gaye (le chanteur assassiné par son père) et Phil Spector. Premiers mystères : Marvin Gaye n'est absolument pas traité, ni cité dans l'ouvrage (!), Robert Kennedy est peu évoqué dans le chapitre sur Marilyn, et l'accident de Natalie Wood fait vraiment peu de doute pour être pris comme référence de "crime scene" en couverture. Autres mystères de cette couverture (signée Damien Margotin - on reste en famille) : même si on reconnaît Marilyn Monroe, il aurait été judicieux de préciser que l'autre femme en photo est Sharon Tate tandis que l'homme est (probablement) Bugsy Siegel.
Depuis Hollywood Babylone, le célèbre livre du réalisateur underground Kenneth Anger traduit chez Pauvert en 1957 et repris chez Régine Desforges en 1977, le public connaît ses classiques. Il faut dire qu'Anger n'y est pas allé avec le dos de la cuillère. Raclant les caniveaux des journaux à scandales, il aligne les turpitudes des stars (réelles ou imaginées) dans un ouvrage abondamment illustré de documents méconnus et de vignettes très drôles, tirées de films, qui, hors contexte, mettent en scène le scandale cité. C'est désormais un livre-culte qui en a inspiré bien d'autres... Hollywood est une usine à fric, Margotin n'a eu qu'à puiser dans ce saladier de vices pour aligner des affaires. S'il en choisit peu - 13 -, on pourrait s'attendre à ce qu'il apporte un plus par rapport à ce qui a déjà été écrit. Dommage ; on sent qu'il n'a pas assez travaillé sur les hypothèses. L'affaire du gros comique Fatty Arbuckle (accusé en 1921 d'avoir causé la mort d'une starlette au cours d'une party orgiaque), celle de l'assassinat de l'acteur cinéaste bissexuel William Desmond Taylor (1922), ou celle du producteur de western Thomas H. Ince mort à la suite d'une croisière très arrosée sur le yacht du magnat de la presse William Randolph Hearst, sont bien détaillées au niveau du parcours des protagonistes mais floues quant à la vérité. Si Philippe Margotin évite les détails cochons d'Anger (par exemple la fameuse bouteille de Champagne qui servit à tout, sauf à boire, dans l'affaire Fatty/Virginia Rappe), il a tendance à aligner les hypothèses sans dégager la plus vraisemblable. Ce n'est donc pas un travail d'historien mais plutôt de compilateur d'articles de presse. Par contre, et cela est sans doute dû à des sources plus modernes, conséquentes et accessibles, Philippe Margotin est efficace dans les affaires postérieures à celles d'Anger : celle de Sharon Tate (1969), femme de Roman Polanski et enceinte de huit mois, massacrée avec trois amis par la bande à Manson qui réitéra le massacre quelques jours plus tard avec le couple LaBianca ; celle d'O. J. Simpson (1994) accusé du double meurtre de sa femme et de son ami ; celle de l'acteur Robert Blake (2001) dont la femme fut revolverisée dans sa voiture et celle de Phil Spector (2003) producteur légendaire du rock, fétichiste des armes à feu (il en possédait plus de trente chez lui) dont l'une tira une balle dans la bouche d'une starlette rencontrée un soir et amenée dans l'ex-hôtel Pyrenees Castle devenu sa gigantesque demeure.
D'une écriture concise qui évite la grandiloquence, Philippe Margotin construit un recueil qui a le mérite de nous rappeler ces grandes affaires criminelles qui ont, en leur temps, déchaîné les médias. On regrettera les suicides et les accidents qui éloignent de la thématique criminelle (Natalie Wood, Paul Bern le tout nouveau mari de Jean Harlow, George "Superman" Reeves et même Marilyn Monroe !) de même que l'absence de l'affaire de Marvin Gaye, annoncée pourtant en couverture et, pour les classiques, le meurtre du gangster-gigolo de Lana Turner, soit disant poignardé par la fille de la star âgée de seize ans. On regretta encore plus le manque d'illustrations et le nombre de pages limité (166) pour un livre à quasiment vingt euros.
Dans la même veine, on pourra consulter les ouvrages de Vincent Mirabel, Hollywood, crime stories chez First (2011), 16,90 €, qui commente aussi la croisière fatale à Ince, et la soirée tout aussi fatale à Sharon Tate mais ajoute le braquage de John Holmes, gros calibre du porno, et celui de Hélène Merrick, Meurtres à Hollywood, Scènes de Crime éditeurs, 9,97 €, qui revient sur les affaires Tate et LaBianca, Lennon, Monroe, O. J. Simpson en ajoutant, lui, le meurtre de Johnny Stompanato, l'amant de Lana Turner.
Citation
Le sergent Clemmons ne dit pas un mot. Mais il s'interroge : un suicide par surdose de somnifères s'accompagne presque toujours de convulsions et de vomissements. Rien de tel ici.