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Crimes et chocolat
Grand format
Inédit
Tout public
Et merci pour le chocolat
Alice Lyner est le nom créé par l'ex-ingénieur Sébastien Delaveau pour sa maison d'édition régionaliste en territoire berrichon à la sortie d'Issoudin. Il publie un étonnant ouvrage de Chantal Pommier qui est professeur de lettres, comédienne et, certainement, amatrice du "nectar des dieux"... Crimes et chocolat tient-il la gageure de travailler sur un sous-groupe d'une catégorie du crime (chocolat > empoisonnement > CRIME) ? Malheureusement non. Le lecteur d'affaires criminelles est un peu déçu, car les véritables affaires sont rares.
On y lit l'histoire d'Antoine-François Desrue, épicier parisien qui, au lieu de payer une dette auprès de Mme de Lamotte l'empoisonna avec du chocolat, fit de même avec le fils mais échoua avec le père. En 1774, le pape Clément XIV aurait été empoisonné avec du chocolat selon la lettre d'un diplomate. Don Bernard de Salazar, évêque mexicain, en 1630, aurait été empoisonné lui aussi par un verre de chocolat suite à la menace d'excommunions de toutes celles qui se gavaient de la boisson lors des offices. La fameuse (pour ses contes de fées) Mme d'Aulnoy, fut accusée, à l'âge de seize ans, d'avoir monté un complot contre son vieux mari pour le faire décapiter pour crime de lèse-majesté. Elle monta le coup avec sa mère et leurs amants respectifs. Le complot fut déjoué, les hommes décapités et les femmes exilées en Espagne grand pays consommateur de chocolat. Dans sa Relation du voyage d'Espagne (1691), elle relate un empoisonnement au chocolat. Ses Mémoires des Cours d'Espagne et d'Angleterre ayant été, au mieux, pompées à diverses sources voire inventées, l'histoire est douteuse. Doute aussi sur Frédéric II et carrément invention sur la tentative d'empoisonnement de Napoléon par une domestique corse autrefois séduite et engrossée.
Dans le dernier chapitre, l'auteur écrit sans développer : "En avril 2006, Ghislain Beaumont, âgé de quarante-cinq ans, voulant se libérer de l'emprise de sa mère, introduisit un puissant insecticide dans la mousse au chocolat qu'elle avait préparé, tuant ainsi ses deux parents." Elle sera plus prolixe sur la dernière affaire de 2008, celle de la bouchée Mon chéri posée, avec un petit mot doux, sur le pare-brise d'un maire autrichien qui la mange imprudemment. La liqueur était lestée de sept-cent milligrammes de strychnine ! Le maire s'en sort mais dans quel état ! Même si le coupable est arrêté, une psychose s'installe parmi les élus qui reçoivent aussi des chocolats d'imitateurs farceurs.
Mais si le lecteur doit faire son deuil d'un recueil entier consacré aux meurtres par chocolat, par contre, Chantal Pommier nous propose une érudite promenade littéraire (Sade, Andréa de Nerciat, Agatha Christie, Charlotte Armstrong - dont on nous apprend que le mari fut assassiné par son jardinier -, Claude Chabrol, Jô Soares, Alexandre Tarassov-Rodionov). L'auteur prend soin de citer ses sources à chaque fin de chapitre et n'oublie pas les riches côtés historiques et économiques sur la guerre (contre les insectes, les maladies, les mafias) et l'avenir du chocolat.
Au final, un livre étonnant, consistant mais léger comme... un chocolat bien mousseux.
Citation
Lorsque nous laissons le chocolat fondre voluptueusement sur notre langue, nous ne pensons guère aux cabosses et leurs fèves si précieuses, séchées, ensachées et puis transportées à dos d'hommes.