Lire nº434

Il sera beaucoup pardonné à François Busnel car il a beaucoup souffert pour écrire, comme chaque année à la même date, son édito consensuel où il prône son amour pour une littérature policière qu'il ne défend aucunement au quotidien. On le remerciera en outre pour la brillante histoire absurde concoctée à cette occasion qu'il nous narre, et surtout, étrangement, on priera pour qu'il reste à Lire et à La Grande librairie car sinon il nous menace d'ouvrir une librairie (heureux et naïf homme qu'il est). "Il fut un temps où le polar était considéré par un peu tout le monde comme un sous-genre littéraires" : voilà une entrée en matière des plus saugrenues du genre qui enfonce des portes que certains mais pas tous tiennent ouvertes. Et puis la suite est à la hauteur de son introduction comme un camembert bien fait qui passe plusieurs jours au soleil dans une région de l'État de l'Utah où les Américains rédigent leurs essais non pas littéraires mais atomiques. Quittons donc cet édito et cette cliente au cabas qui a croisé François Busnel et l'a apostrophé comme tous ces Français (qui détiennent la vérité) qui vont à la rencontre de nos hommes politiques pour être tenus comme une généralité à la télévision pour nous appesantir sur ce numéro "Spécial polar" de la revue.

Tout d'abord, force est de constater que dans l'ego-pub sur La Grande librairie, François Busnel n'a pas jugé bon de mettre en pratique son édito (c'est plus fort que moi, j'y reviens sans cesse !). Nul doute qu'à l'occasion de Quais du polar, aucun auteur digne d'intérêt à ses yeux est venu trimballer sa carcasse de Lyon à Paris vu que le programme ne montre aucun auteur de roman policier pour le mois. Sinon, force est aussi et toujours de constater que nombre de romans et recueils de nouvelles défendus dans la revue en dehors du dossier sont des romans et des recueils de nouvelles de genre. Mais sans doute que si les frontières sont poreuses, il vaut mieux les classer parmi la "vraie littérature" car ce sont comme l'a dit la cliente au cabas du début (il faut me suivre !) non pas des romans policiers mais des romans (c'est dommage, elle aurait dû mettre des capitales). Mais le dossier me direz-vous ? Il a le mérite d'exister sans être d'une originalité folle. Le magazine Lire, qui semble lire plus de romans que de romans policiers (mince, je me sens contaminé...) ne manque pas de décliner ses dix meilleurs polars de l'année (le truc est bateau et souffre évidemment de la critique qui ne manquera pas de relever les oublis et les exagérations). Mais les articles sont plutôt bien foutus. Christine Ferniot (qui s'est offert une visite chez Michael Connelly) nous parle sommairement et explicitement du roman espagnol après la guerre de Franco. Hubert Artus n'a pas manqué de voir le virage pris par la "Série noire", un virage lié à la crise économique qui nous touche et interpelle les auteurs, Dominique Manotti et Thomas Bronnec en tête. Et puis une liste d'auteurs croisés ici et là livrent leur arme du crime sans que l'on sache s'il s'agit d'un crime parfait ou pas. Certains jouent le jeu, d'autres semblent s'être ennuyé à répondre. Enfin, il y a des extraits d'ouvrages (ben oui, cent six pages quand on s'appelle Lire, il faut remplir(e) sinon le numéro serait bien maigre).
Lire finit sur une bonne nouvelle car au détour d'un article consacré à Mark Twain, on apprend qu'une "Pléiade" va voir le jour. Mine de rien, c'est une véritable et fichue bonne nouvelle qui justifierait presque le prix du magazine !

Sommaire :
Édito, par François Busnel
Le Choix des libraires (À la vie, à la mort, de Colette Mcbeth & Finsterau, de Andrea Maria Schenk), par Coline Meurot & Magali Carnero
La Plume, le pinceau et l'oiseau (Le Chardonneret, de Donna Tartt), par Fabrice Gaignault
DVD (Le Solitaire, de Michael Mann & La Prochaine fois je viserai le cœur, de Cédric Anger, par Baptiste Liger
Palmarès : les meilleures ventes polar (Le Garçon qui ne parlait pas, de Donna Leon, La Pyramide de glace, de Jean-François Parot, Un fond de vérité, de Zygmunt Miloszewski & Satan était un ange, de Karine Giébel) & les meilleures ventes de poche (N'éteins pas la lumière, de Bernard Minier)

Dossier spécial polars :
Les 10 meilleurs polars (L'Enfer de Church Street, de Jake Hinkson, Personne n'en saura rien, de Sylvie Granotier, L'Archange du chaos, de Dominique Sylvain, Dans son ombre, de Gerald Seymour, Mauvais sang ne saurait mentir, de Walter Kirn, Six fourmis blanches, de Sandrine Collette, Les Temps sauvages, de Ian Manoock, La Vérité et autres mensonges, de Sascha Arango, Vogonzero, de Yana Vagner & Viscères, de Mo Hayder), par Christine Ferniot, Alexandre Fillon, Baptiste Liger & Hubert Artus
Sur les traces de Bosch : Michael Connelly, portrait de Christine Ferniot & photos d'Alain Bali
Polar et finance : enquêtes en col blanc (Or noir, de Dominique Manotti, Les Initiés, de Thomas Bronnec & L'Affaire des affaires, de Denis Robert & Laurent Astier), par Hubert Artus
Le Renouveau du polar espagnol (Francisco González Ledesma & Manuel Vázquez Montalbán ; Toutes les vagues de l'océan, de Víctor del Árbol, De chair et d'os, de Dolores de Redondo & Le Plus jeune fils de Dieu & Japonais grillés, de Carlos Salem), par Christine Ferniot
L'Arme du crime (Le poison d'Elizabeth George, les mains de Tim Willocks, les lois de la gravité de Deon Meyer, le chlorure de potassium de Franck Thilliez, le stiletto de Roger Jon Ellory, la plume de Harlan Coben, le passé de Caryl Férey & la fuite de gaz de Michel Bussi), par Julien Bisson & Hubert Artus
Quais du polar : le sacre du roman "noir", par Léonard Desbrières & Les rendez-vous de Lire
Extrait polar (Du sang sur la glace, de Jo Nesbø & Monnaie de sang, de Patricia Cornwell ; accompagnés d'une biographie)

Les incontournables romans étrangers (Les Bandits, de Jorge Volpi, Londres après minuit, d'Augusto Cruz & Le Cœur qui tourne, de David Ryan), par Alexandre Fillon & Hubert Artus
Extrait nouvelles avant-première (Incandescences, de Ron Rash ; accompagnés d'une biographie)
Idées & essais (La Seconde Guerre mondiale, de Claude Quétel), par Marc Riglet
Jeunesse (Dans les yeux d'Anouch, de Roland Godel, Dashiell Hammett, collectif & Plus de morts que de vivants, de Guillaume Guéraud), par Nathalie Riché
Les Écrivains du bac : Mark Twain, par Jean Montenot