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Série criminelle (25)
© David Delaporte / k-libre
15 septembre 2013 -
Le cinoche de la disparition. L'écriture cinématographique et le parler littéraire ne jouent pas la même musique, et le grand public n'a pas les mêmes attentes. Jim Thomson, comme d'autres auteurs de noir, a fréquemment édulcoré son style pour satisfaire au goût hollywoodien du moment ou, confronté à un artiste du Septième de la dimension d'un Stanley Kubrick, s'est proprement fait doubler, doubler au sens propre, cantonné au "dialogues additionnels", dépassé par un savoir-faire et une vision dont il ne possédait rien. (Sur le tournage de The killing/Ultime razzia, 1956, tiré du roman de Lionel White, Clean Break/En mangeant de l'herbe – "Série noire"). Pourtant, sans la littérature, le cinoche ne serait plus rien depuis longtemps, et si s'était réalisé le scénario catastrophe qui n'a sans doute pas fini d'angoisser les écrivains : à savoir la disparition des livres ou leur interdiction, il ne serait pas resté grand-chose du roman de Jim Thomson 1275 âmes (1280 en américain...), par exemple, après un tel Coup de torchon (adaptation du roman par le cinéaste Bertrand Tavernier). Mais si la disparition du cinoche devient techniquement possible, celle de la littérature ne l'est plus : l'agonie du papier (malicieusement annoncée par Alphonse Allais) est largement consommée. Reste évidemment la substance de l'écriture, dont on ne peut préjuger si elle a, ou non, une chance de subsister. Mais c'est un tout autre cinoche : c'est celui de l'humanité.
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Liens : Jim Thompson | Bertrand Tavernier
Par Stéphane Prat