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Poche
Réédition
Public averti
L'année du rat
New York, 1982. Alors que la canicule écrase la ville, des prostituées disparaissent et l'on retrouve des restes humains mutilés dans le Bronx. Pas de quoi fouetter un chat dans une ville qui était alors l'une des plus meurtrières des États-Unis. Cependant, la détective Farley, jeune fliquette noire qui n'a pas froid aux yeux, en a décidé autrement et, flanquée d'un partenaire raciste, alcoolo et misogyne, elle va tenter de tirer au clair les curieuses histoires de rats mutants et anthropophages qui écumeraient le métro et les égouts de la Big Apple. Avec Garbage Rampage, initialement publié en 2014 aux défuntes éditions Trash qu'il avait créés, Julien Heylbroeck rendait hommage aux romans de la collection "Gore" du Fleuve Noir, aux séries Z, à James Herbert et aux rats en général, mais aussi et surtout sans doute au New York d'avant la gentrification, à cette ville sale, dangereuse et abandonnée des autorités où le danger était quotidien, où des quartiers entiers du centre-ville servaient de terrain de jeu aux prostituées et aux drogués, et où les propriétaires préféraient incendier les bâtiments que les entretenir. La ville des cinémas porno de la 42e rue, du CBGB, des punks et du Velvet Underground. Fidèle aux schémas du genre, Julien Heylbroeck ne se soucie ici nullement de bon goût, et enchaine scènes horrifiques riches en tripailles et scènes de sexe explicites, avec la volonté évidente de choquer son lecteur, l'enquête policière y étant réduite à sa plus simple expression. Pourtant, entre deux flaques d'entrailles et deux mutilations, on retrouve bien l'affection de l'auteur pour les microcosmes borderline (ici des clochards et toxicos particulièrement azimutés, ailleurs des gueules cassées ou des catcheurs mexicains) qu'il met en scène avec un talent évident. Roman de jeunesse, frondeur et excessif, Garbage Rampage, à réserver évidemment à un public averti et sensible à une certaine forme de déréliction humaine autant qu'urbaine, outre qu'il est moins bien maîtrisé que les romans ultérieurs de l'auteur, est hélas un peu trop prévisible à force d'être référentiel, ce qui lui retire une partie de son capital de terreur. Mais si vous aimez les rats, la chair pourrie et le New York de Taxi Driver, Garbage Rampage est certainement pour vous.
Citation
La dépouille gisait, en plusieurs morceaux, dans une arrière-cour miteuse. Entre les poubelles métalliques s'étalaient les intestins, noueux et verdâtres, comme une corde à noeuds grumeleuse et emmêlée. Ils avaient laissé échapper un peu de sang qui avait séché en se mélangeant à du Dr Pepper écoulé d'une canette.