Tokyo revisitée

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jeudi 21 novembre

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Roman - Noir

Tokyo revisitée

Historique - Assassinat - Cold case MAJ samedi 18 juin 2022

Note accordée au livre: 5 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 22 €

David Peace
Tokyo Redux - 2021
Traduit de l'anglais par Jean-Paul Gratias
Paris : Rivages, mars 2022
430 p. ; 23 x 16 cm
ISBN 978-2-7436-5575-4
Coll. "Noir"

Actualités

  • 21/06 Prix littéraire: Sélection pour le Grand Prix de littérature policière 2022
    À la mitan de juin, le jury de ce prix bicéphale, qui récompense conjointement, rappelons-le, un roman écrit en français et un roman étranger traduit, se réunissait pour définir la liste des trente œuvres présélectionnées. En attendant la remise des prix cet automne (première quinzaine d'octobre, dit-on), voici la liste telle qu'arrêtée par les jurés – quatorze romans francophones et seize traduits :

    ROMANS FRANCOPHONES
    La Double Vie de Laura_73, de Laurent Bettoni (Cosmopolis, novembre 2021).
    Appartement 816, d'Olivier Bordaçarre (Atalante, octobre 2021).
    Gueules d'ombre, de Lionel Destremau (La Manufacture de livres, avril 2022).
    De silence et de loup, de Patrice Gain (Albin Michel, septembre 2021).
    Les Cow-boys sont fatigués, de Julien Gravelle (Le Seuil, janvier 2022).
    Au bout de la nuit, de Pierre Hanot (Konfident, avril 2022).
    Les Derniers jours des fauves, de Jérôme Leroy (La Manufacture de livres, février 2022).
    Les Larmes du Reich, de François Médéline (10-18, avril 2022).
    Le Carré des indigents, de Hugues Pagan (Rivages, janvier 2022).
    La Menace 732, de Frédéric Potier (L'Aube, mai 2022).
    Mécanique mort, de Sébastien Raizer (Gallimard, mai 2022).
    Usual victims, de Gilles Vincent (Au diable Vauvert, février 2022).
    Les Loups, de Benoît Vitkine (Les Arènes, février 2022).
    Qui voit son sang, d'Élisa Vix (Le Rouergue, avril 2022).

    ROMANS ÉTRANGERS
    American Predator, de Maureen Callahan (traduit par Corinne Daniellot ; Sonatine, novembre 2021).
    La Mort sur ses épaules, de Jordan Farmer (traduit par Simon Baril ; Rivages, janvier 2022).
    Les Rites de l'eau, d'Eva Garcia Saenz de Urturi (traduit par Judith Vernant ; Fleuve, mai 2022).
    Tu marches parmi les ruines, de Tyler Keevil (traduit par Fabrice Pointeau ; Le Seuil, février 2022).
    Riley tente l'impossible, de Jeff Lindsay (traduit par Julie Sibony ; Gallimard, mai 2022).
    La Voix du lac, de Laura Lippman (traduit par Hélène Frappat ; Actes Sud, février 2022).
    La Vague arrêtée de Juan Carlos Mendez Guedez (traduit par René Solis ; Métailié, octobre 2021).
    Infiltrée, de Mike Nicol (traduit par Jean Esch ; Gallimard, février 2022).
    Les Gens des collines, de Chris Offutt (traduit par Anatole Pons-Reumaux ; Gallmesiter, avril 2022).
    Bobby Mars forever, d'Alan Parks (traduit par Olivier Deparis ; Rivages, février 2022).
    Tokyo revisitée, de David Peace (traduit par Jean-Paul Gratias ; Rivages, mars 2022).
    La Medium, de J. P. Smith (traduit par Karine Lalechère ; Gallimard, janvier 2022).
    Chaque serment que tu brises, de Peter Swanson (traduit par Christophe Cuq ; Gallmeister, juin 2022).
    Au fin fond de la Petite Sibérie, d'Antti Tuomainen (traduit par Anne Colin du Terrail ; Fleuve, septembre 2021).
    Shalom Berlin, de Michael Wallner (traduit par Sylvie Roussel ; Filature(s), octobre 2021).
    Lady Chevy, de John Woods (traduit par Diniz Galhos ; Albin Michel, février 2022).
    Liens : Appartement 816 |Les Derniers jours des fauves |Le Carré des indigents |Mécanique mort |Les Loups |La Mort sur ses épaules |Riley tente l'impossible |Laurent Bettoni |Olivier Bordaçarre |Pierre Hanot |Jérôme Leroy |François Médéline |Sébastien Raizer |Gilles Vincent |Élisa Vix |Jordan Farmer |Jeff Lindsay |Mike Nicol |David Peace |Antti Tuomainen

Cold case ferroviaire

1949. Tokyo est occupée par l'armée américaine à la suite de la défaite du Japon. Dans cette métropole abattue, en proie à la misère, à la maladie, à la famine et au racisme, le corps du nouveau président des chemins de fer japonais est retrouvé éparpillé aux abords d'une voie ferrée. Suicide ? Assassinat ? La question se pose tant Sadanori Shimoyama était détesté par ses propres employés, dont les Américains voulaient le forcer à licencier une grande part, et tant ce poids lui pesait. Voyant, dans ce qui leur apparaît comme un assassinat, l'œuvre des communistes, les occupants lancent sur l'enquête un flic du Montana, assisté de la police japonaise. En vain. Quinze ans plus tard, un auteur travaillant sur l'affaire disparaît à son tour et son éditeur engage un détective privé japonais pour le retrouver. Et, pour finir, quarante ans après la mort de Shimoyama, c'est un ex-agent de la CIA devenu traducteur qui se lance à son tour sur l'enquête. À travers le temps, ces trois hommes possédés par leurs propres démons vont tenter de percer les mystères de ce Japon d'après-guerre tout en essayant de ne pas perdre pied.

Avec Tokyo revisitée, David Peace met un point final à sa trilogie japonaise, dont le deuxième volume était paru il y a tout de même douze ans. Un délai qui avait pu faire craindre que l'auteur britannique ait fini par se perdre à son tour dans les énigmes du passé de son pays d'adoption, mais que ce nouveau volume (indépendant comme les deux précédents, le terme de trilogie étant ici à prendre au sens de thématique) vient justifier amplement. Car David Peace n'est pas, loin s'en faut, un auteur facile. Styliste passionnant, il adore triturer la langue, l'écriture, et donner à chaque phrase de ses textes une raison d'exister. Comme son confrère et modèle James Ellroy dont il admet volontiers l'influence sur son propre travail, il n'a de cesse de pousser le lecteur à avoir une part active. À travers des phrases scandées, des répétitions, un rythme incantatoire qui appelle à une lecture à voix haute, il mêle le réel et le fantasme, les voix des vivants comme les souvenirs des morts dans un dédale de pistes où l'on se perd aussi souvent que ses protagonistes. Sans la moindre concession ni facilité, David Peace décortique le crime, la société, une humanité en ruine et les rapports complexes entre occupant et occupé, vainqueur et vaincu, à partir de trois époques judicieusement choisies (la défaite, l'organisation des jeux Olympiques de 1964 et la mort de l'empereur) et plus qu'une reconstitution de l'un des cold cases les plus célèbres du Japon, se livre à un formidable roman d'ambiance : moite, poisseuse, hantée, qu'il serait vain de tenter de raconter, car chacun y trouvera ce qu'il est prêt à laisser de lui-même. Un roman exigeant, complexe, mais qui achève d'inscrire la "Trilogie japonaise" au firmament du roman noir.

Citation

Harry Sweeney joint les mains. Il lève les mains jusqu'à son visage. Il incline la tête. Il ferme les yeux. Au milieu du siècle pour les Américains, au cœur de la nuit en Amérique. Agenouillé dans sa chambre, sa chambre d'hôtel. La pluie qui frappe aux carreaux, la pluie qui tombe dans la nuit.

Rédacteur: Jean-François Micard mardi 17 mai 2022
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