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Grand format
Inédit
Tout public
Traduit de l'anglais par Séverine Quelet
Paris : Les Escales, octobre 2024
472 p. ; 23 x 14 cm
ISBN 978-2-36569-837-5
Coll. "Les Escales noires"
La chèvre et le chou
Un soir, un quidam nommé Mark Willis se retrouve pourchassé par une foule aveugle et préfère sauter d'un pont, la privant ainsi de la joie de le massacrer. Un acte gratuit ? Mais voilà, le poursuivi était censé s'appeler en réalité Lian Sullivan. Dans son enfance, il avait violé et assassiné une vieille dame. Libéré, il était sous un programme de protection lui ayant donné une nouvelle identité. Il faut croire que quelqu'un s'est infiltré dans les dossiers des Services de Probation… D'autres commencent à s'inquiéter : Jack, enfant abusé et tueur d'un garçon de quatre ans, qui vit déjà dans la terreur, mais aussi Olivia Campbell, chargée des placements, et ses collègues qui craignent que l'affaire leur retombe dessus. Tout comme Courtney Turner et Keylee Jones, deux meurtrières qui, à onze ans, ont assassiné une de leurs camarade de classe. À onze jours de Noël, les ministères de la Justice et de l'Intérieur exigent des éclaircissements. De son côté, Mike, le père de la victime des deux meurtrières, reçoit un message lui donnant l'identité actuelle de Courtney Turner. Pour combattre des monstres, faut-il devenir un monstre ? Mais surtout, qui aurait avantage à jouer ainsi les corbeaux ? Et comment a-t-il ou elle pu avoir accès à ces informations confidentielles ?
On avait laissé M. J. Arlidge sur le pitoyable dernier épisode de sa série consacrée à Helen Grace. Ce roman indépendant a été lancé de façon particulièrement sensationnaliste, avec l'accroche putassière "Que feriez-vous si vous vous retrouviez en face de l'assassin de votre enfant ?" M. J. Arlidge surferait-il sur le retour en grâce de l'histoire d'autodéfense, jadis taxée de "facho", aujourd'hui du dernier politiquement correct ? (Quoique, la présence de deux meurtrières de onze ans laisse planer un doute sur ce point.) Puisque le roman est vendu sur son fond, allons-y... En fait, on a affaire à un récit sans véritable compas. On nous présente les meurtriers comme des êtres humains, parfois pitoyables (le personnage de Jack), perpétuant une spirale de violence et bien loin d'une quelconque récidive. Mais d'un autre côté, on présente de la même façon les justiciers potentiels comme Mike comme des êtres détruits, et l'horreur des faits reprochés semble justifier leurs exactions. On sent qu'il s'agit moins d'une volonté de laisser le lecteur se faire sa propre opinion que de ménager la chèvre et le chou, même si la fin, sans déflorer, donne quelques indices. Sinon, la forme est à nouveau celle d'une série télévisée prémâchée où se multiplient les personnages au point qu'il devient dur de savoir qui est qui, d'autant que certains ont plusieurs identités et sont réduits à quelques traits sans jamais susciter d'empathie. Et on mouline des événements ne servant qu'à noircir de la page en comptant sur la classique division en jours pour tenir le minimum syndical de suspense, même si le style (et la traduction) est plus recherché qu'à l'habitude… Après ces plus de quatre cents pages bien tassées, on en vient enfin à quelques moments prenants, mais c'est tout de même un peu tard. On imagine qu'après assez de hype et de têtes de gondole, ça finira par se vendre. Pour la fraîcheur et l'inventivité, il faudra chercher ailleurs...
Citation
Pour ceux que le monde condamne, il n'y a jamais de retour en arrière. Ils sont marqués à vie, souillés par leurs crimes, à jamais des parias parmi les anges. Même lorsque les mauvais traitements qu'ils subissent justifieraient qu'on leur accorde un mot gentil, un minimum de compassion, ils ne reçoivent rien. Ils sont damnés et leur seul rôle est de souffrir.