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Grand format
Réédition
Tout public
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Elisabeth Gille
Paris : Denoël, février 2025
278 p. ; 21 x 15 cm
ISBN 978-2-207-16647-5
Coll. "Sueurs froides"
La main sur le berceau
À la Grande Maison, un asile psychiatrique pour enfants inadaptés, les fenêtres sont étroites, les ombres noires comme de l'encre et les secrets mortels... C'est là que Joey Fane a passé deux ans après que son petit frère ait fait une chute et, apparemment, se soit vidé de son sang sous le regard de Joey. Du moins est-ce la version officielle, suffisante pour enfermer Joey, tant pour son bien que celui des autres, aux bon soins du Dr Bé. Le jour de sa libération, Joey va affronter un autre danger : celui incarné par celle qui veut qu'on l'appelle, Nounou, soixante-quinze ans, embauchée à la naissance de feu le petit frère et qui s'est rendue indispensable à Virgie, la mère de Joey. Celle dernière refuse obstinément que Nounou prenne la porte. Et pourtant, Joey en a une peur bleue, persuadé qu'il est qu'elle veut le tuer. Et si Nounou avait étendu son emprise sur Virgie et considérait effectivement Joey comme le Mal absolu ? Mais qui pourrait vouloir nuire à un enfant ?
Disons-le au préalable, la tentative des éditions Denoël de rééditer des œuvres appartenant au patrimoine du genre est plus que louable. Mais faut-il pour cela ressortir un livre plus que controversé ? Même à sa sortie, beaucoup considérèrent son adaptation cinématographique comme supérieure ! (Confession à un cadavre, 1965, avec Bette Davis — curieusement une production de la vénérable Hammer, qui produisit des suspenses entre deux Dracula, et même écrits par leur scénariste maison Jimmy Sangster.) Pour le bon point, on peut dire que le roman préfigure de trente ans la vogue des baby-sitters maléfiques cinématographiques genre La Main sur le berceau. Pour le reste... Déjà tout le roman suit une vogue actuelle assez déplaisante en se déroulant uniquement en dialogues et jet de consciences, si bien que les lieux ou les déplacements restent dans le flou, sans que le lecteur ait quoi que ce soit à se raccrocher, comme si l'auteure pensait déjà à l'adaptation cinématographique. Mais même l'action en soi en devient floue et difficile à suivre avec bien trop de personnages diluant un texte pourtant relativement court. Quant aux motivations de la méchante, à part un peu de pop-psychologie très datée, elle est un brin légère. Et que dire du personnage de la mère qui ressemble à une écervelée peuplant les vieux "had-I-but-known" et... les thrillers-Netflix actuels, comme en un détestable retour vers le passé. De plus, la conclusion, qui renforce l'hypothèse que le livre fut vite torché en lorgnant l'adaptation cinématographique, se clôt de façon expéditive. Il y avait du potentiel (on imagine ce qu'un Robert Bloch eût fait d'un tel point de départ...), mais les classiques réussissent à transcender les procédés de leur époque pour devenir intemporels (il suffit de voir comme bien des Hitchcock fonctionnent encore aujourd'hui). Malheureusement, on ne peut pas dire que ce soit le cas ici...
Citation
Joey ne répondit pas, mais en passant devant le Dr Meducca pour entrer dans l'appartement, il lui jeta un coup d'œil tel que le médecin frissonna. Il n'avait jamais vu pareille expression sur un visage d'enfant. Sur des visages de patients, quand ils se découvraient atteints d'un cancer incurable – perdus, pris au piège ; mais jamais sur un visage d'enfant.

