Le jeune Molloy, dix-huit ans, est chauffeur de taxi débutant. Orphelin, il a passé ses seize premières années dans un sinistre établissement, avant d'être recueilli par sa grand-mère Edna. Mais il a fallu attendre que la brave femme perde Roxy, son cher berger allemand, car selon elle, « c'est une règle fondamentale de l'existence, Molloy, on n'élève pas convenablement un chien en ayant un enfant avec soi ». Deux ans après son arrivée chez cette aimante aieule, lâché à bord de son engin dans le tumulte new-yorkais, le jeune et inexpérimenté Molloy va vite faire une fixation sur les nombreuses femmes splendides qu'il prend en course. Intimidé par leur grande beauté, il finit par élaborer une théorie qui débouche sur une méthode pour leur plaire enfin, méthode qu'il va vite vouloir mettre en application. Mais cela va-t-il être du goût de sa très rigide grand-mère ?
Triste destinée que celle du jeune Molloy ! Dimberton a écrit une histoire bien sombre, qui joue sur la personnalité quasi schizophrène de son « héros ». Manipulé par une grand-mère dont le degré de perversion fait frémir, il vit dans son monde, tel un bienheureux béat. Le scénario est habilement construit, car passé un certain étonnement devant les réactions niaises du jeune homme, le lecteur saisit le jeu retors de la grand-mère. Chabert, au dessin, a fait à Molloy une tête de lapin, aux dents en avant dépassant d'une bouche constamment entrouverte, et d'Edna, une femme sévère au corps sec et au regard acéré derrière des lunettes triangulaires qui lui confèrent un air guindé. Contraste saisissant avec les clientes du taxi de son petit-fils qui sont elles de vraies pin-up. Mais contrairement à ce que pourrait laisser entendre la couverture, cet album n'est pas une bande dessinée divertissantes de plus avec des filles sexy juste là pour appâter le lecteur mâle… Taxi Molloy est au contraire un vrai récit noir, beaucoup plus subtil qu'une lecture trop rapide ne le laisserait croire.
