CHRONIQUES

livres • bandes dessinées • comics
Prix : 15
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Édité chez
Nombre de pages : 276
Format : 13x20cm
Année de parution : 2002
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8 / 10

Un pompier nommé Béru

Auteur :

Une chaude lance

Retour sur le deuxième opus officiel des « Nouvelles aventures de San-Antonio ».
Avec Corrida pour une vache folle, premier titre de la nouvelle série, Patrice Dard était attendu au tournant, et l'accueil de certains journalistes a prouvé que le flambeau ne serait pas facile à transmettre, indépendamment de la qualité du livre lui-même. Avec ce Pompier…, Patrice Dard prend définitivement ses marques, s'approprie une bonne fois pour toutes l'univers san-antoniesque. Tout en assumant l'héritage paternel, il impose sa griffe.

Il y a dans cette aventure un épisode tout à fait marquant, lourd de symboles. Il s'agit de l'annonce précoce de l'assassinat de Félicie, et de la presque tentative de suicide qui a failli s'ensuivre. On relève dans ce passage quelques lignes poignantes, qui tranchent presque d'avec la tonalité habituelle du genre, et qui en font une sorte de parenthèse tout à fait remarquable. Mais au-delà du ressort dramatique, cette péripétie semble définitivement asseoir la légitimité de Patrice Dard aux manettes de la série : au moment de la mort de Frédéric Dard, nombreux sont ceux qui ont pu penser que San-Antonio la série ne survivrait pas à son auteur. San-Antonio le personnage est persuadé ne pas survivre à sa génitrice. Or, rebondissement prévisible, Félicie est bien vivante, et San-A de reprendre l'enquête, comme Patrice reprend la série. Le parallèle est frappant et il se dégage un message plein de sens de cet épisode : San-Antonio est aussi, contrairement à ce qui a pu être dit, un esprit et une tradition, et pas seulement un auteur !

Démonstration :
– La rupture de l'illusion romanesque : adresses au lecteur, renvois en bas de page, considérations et soliloques du héros qui brisent l'illusion du roman en commentant l'action en cours, en faisant l'amalgame entre auteur, narrateur et personnage. On le sait, Frédéric était friand de ce jeu, qui a également contribué à la légende de la série. Il était donc normal que Patrice s'y collât, et il le fait à merveille. Mais à la différence de son père qui en usait à des fins essentiellement ludiques, Patrice y adjoint un message et non des moindres : la conversation avec Macha au restaurant asiatique, ou le bref dialogue avec sa voisine pipeuse semblent stigmatiser un aspect que l'on a toujours reproché peu ou prou, à tort ou à raison, à San-Antonio : sa misogynie. Or, les personnages féminins semblent vouloir faire infléchir cette réputation. Et, virage d'une importance capitale, le nouveau San-Antonio accepte les reproches, les reconnaît, s'en excuse et fait presque acte d'allégeance… Ces fameux apartés sont comme une profession de foi). Il ne s'agit certes pas là d'une mince révolution…
– Les personnages : ce mouvement avait déjà été amorcé dans Corrida pour une vache folle, à savoir l'élimination de certains personnages, au profit d'un resserrement qui n'a rien d'aléatoire : après Jérémie Blanc, c'est au tour de Mathias de quitter la série. En revanche, un retour au premier plan de taille, celui de Pinaud. On reviendrait donc à la Trinité du début de l'âge d'or de la série : San-Antonio, Bérurier, Pinaud. Est-ce à dire que Patrice Dard lorgnerait du côté du classicisme : certes non, puisqu'il adjoint à cette fine équipe deux personnages jusqu'ici inexploités et dont on pressent qu'ils sont appelés à plus d'ampleur encore : Toinet et Amélie. Tiens, comme par hasard des enfants de… Une fois de plus, on reprend ce qui a fait le succès de la série, mais y apportant une touche personnelle.

© Le Monde de San-Antonio

Article initialement paru le 14 janvier 2010
Publié le 21 mai 2025
Mis à jour le 21 mai 2025
Je m'en vais réfléchir à ce que vient de me balancer cette franche femelle et tourner ma plume sept fois dans l'encre de mes désirs avant d'élaborer un caractère du beau sexe.
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