Philip Taiwo, criminologue, est revenu dans son pays natal, le Nigeria, après avoir vécu aux États-Unis pour suivre son épouse qui est devenue professeure de droit à Lagos. Sa situation professionnelle à lui est un peu plus difficile. En effet, la police locale, même dans la capitale, n’a pas forcément besoin de ses compétences. C’est alors que son père lui téléphone car il a besoin de lui. Un de ses amis, banquier, est le père d’un étudiant qui, quelques mois plus tôt, a été victime d’un crime atroce avec deux de ses condisciples : accusés de vol, les trois jeunes gens ont été frappés, tués, puis immolés enserrés dans un pneu auquel on a mis le feu (les « colliers de feu » du titre). Taiwo va donc se rendre à Port Harcourt, où se trouve la faculté des trois étudiants morts, afin d’enquêter. Mais à peine est-il arrivé, assisté par Chika, un employé de banque chargé de le seconder, que Taiwo se heurte à des complications : la ville, la région, la faculté n’ont pas l’air de vouloir remuer les choses. Tout juste a-t-on arrêté une dizaine de personnes, reconnaissables sur les vidéos du meurtre qui ont circulé sur Internet, et leur procès va commencer. Taiwo se demande alors s’il pourra compter sur l’inspecteur Omereji, venu après le drame, sans doute pour calmer les esprits et qui est, en plus, le fils d’un chef tribal important de la région. Alors que tous les témoins se taisent, ou mentent, que les habitants locaux les regardent d’un drôle d’air, et tandis que des tensions naissent entre les communautés religieuses du coin, attisées par des réseaux sociaux, Taiwo (qui en plus, ayant surpris sa femme dans les bras d’un autre, se demande où va son couple) ouvre des pistes, s’interroge sur les raisons réelles qui ont poussé le banquier à enquêter et par ricochet, redécouvre aussi son pays natal, si différent des États-Unis.
L’intérêt principal du roman de Femi Kayode est bien entendu le cadre nigérian, peu habituel dans la littérature policière. Ici, l’auteur s’est emparé d’un fait divers réel pour écrire une fiction intelligente et bien construite, servie par une intrigue complexe fondée sur diverses manipulations, où sévit un tueur particulièrement vicieux. Pourvu de rebondissements amenés avec soin, avec un arrière-plan sentimental traité sans lourdeur, Les Colliers de feu ne révolutionnera pas le genre mais propose une excellente variation sur le thème de l’étranger venu secouer le quotidien de locaux qui entendent vivre à leur façon. Premier volet d’une nouvelle série, c’est une bonne surprise.