Enfant choyé par un couple aimant, apparemment sans histoires, Charlie Cohen change, comme beaucoup d’autres, à l’adolescence. Rompant avec ses parents, il se réfugie dans la drogue et la musique punk, traîne son mal être d’études avortées en boulots minables. Jusqu’à ce jour de novembre 1988 où il assassine froidement son père et sa mère avant de voler tous les objets de valeur de la maison familiale et de se lancer dans une cavale erratique à travers les États-Unis, tombant chaque jour un peu plus bas.
Journaliste sportif et culturel, David Cassan explore, à travers la cavale de Charlie Cohen, le malaise adolescent, ce qui peut pousser au crime et les conséquences de celui-ci. Plus qu’à proprement parler « sanglante », la fugue du jeune meurtrier est surtout un moyen d’explorer la dérive d’une jeunesse de banlieue, qui se cherche un avenir sans vraiment en trouver et se réfugie dans une éternelle adolescence faite de drogues, de musiques, de jeux vidéo… et d’une violence déréalisée. À aucun moment de sa fuite erratique, qui le voit revenir sur ses pas, aller au hasard dans une direction puis une autre, semant involontairement la pagaille chez ceux qui le recherchent, le jeune meurtrier ne semble prendre la mesure de ses actes, ni décider de son destin. Ballotté à travers les États-Unis, Charlie Cohen, triste assassin, n’est finalement qu’une victime supplémentaire de ses actions irréfléchies. S’attachant principalement aux meurtres et affaires emblématiques, le True crime, ce genre littéraire souvent complaisant et voyeuriste, nous a habitués à des tueurs dignes de personnages de fiction, des « figures du Mal » aussi repoussantes qu’archétypales. Avec La Fugue sanglante de Charlie Cohen, David Cassan met à jour ce que le crime, le vrai, peut avoir de terne, de banal, de médiocre. C’est honnête, même si cela n’engendre pas une lecture des plus captivantes.