Cotton Point

Le décalage était étrange. L'Allemagne était à feu et à sang ; au Département d'État, à Washington, il n'était question que de cols blancs, de crayons rouges de Hull et de la frustration croissante à l'égard de Dodd qui n'avait pas réussi à plaider le dossier des États-Unis.
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jeudi 21 novembre

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Roman - Noir

Cotton Point

Social - Assassinat MAJ mercredi 23 novembre 2011

Note accordée au livre: 5 sur 5

Poche
Réédition

Tout public

Prix: 7,5 €

Pete Dexter
Paris Trout - 1988
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Anny Amberni
Paris : Points, février 2011
414 p. ;
ISBN 978-2-7578-2194-7
Coll. "Roman noir", 2557

Pour la haine de sa femme

C'est à Cotton Point, une petite ville du Midwest américain dans les années 1950 ancrée dans ses mentalités raciales, que sévit Paris Trout. L'homme, Blanc, prête de l'argent à tout le monde, surtout aux Noirs à des taux prohibitifs. Il vend aussi des voitures dont la rouille est cachée sous des couches de peinture. Henry Ray en a pas plus tôt acheté une, qu'un camion l'emboutit révélant son véritable état. Henry Ray est fier et insouciant, il ne paiera pas ses traites. Paris Trout est fier et soucieux, si l'on commence à accepter que l'on puisse ne pas payer ses traites, l'on ne se fait pas respecter. Et sans respect, pas du business possible. C'est pourquoi, en compagnie de Buster Devonne, un ancien flic viré pour violences répétées, il s'en va recouvrer ses créances auprès de la famille de Henry Ray. C'est le début d'une course-poursuite dans la maison avec Miss Mary et Rosie, qui se retrouvent toutes deux plombées. Rosie ne survivra pas. Dans Cotton Point, l'émotion se fait elle aussi violence, et force est de constater qu'il va bien falloir juger Paris Trout d'autant que le juge Townes entend bien en faire une affaire personnelle, au grand dam de l'avocat Seagraves, qui va n'avoir de cesse de se demander quand donc cette affaire prendra fin.

Cotton Point n'est pas un roman sur la violence raciste gratuite dans les années 1950. C'est avant tout un roman qui s'attarde sur le personnage étrange qu'est Paris Trout, vieux aigri, célibataire dans l'âme, qui n'aime vraiment personne à part sa mère impotente dans une maison de retraite, et qui n'a épousé Hannah Trout, ancienne institutrice, que pour assouvir ses pulsions sexuelles et l'asservir. Et c'est bien parce qu'au début du roman, Hannah Trout s'est prise de pitié pour Rosie, mordue au pied par un renard, que cette folie meurtrière a débuté. Durant toute l'intrigue, c'est un combat physique et mental que se livrent les deux protagonistes. Paris Trout est plus fort physiquement. Il impose donc son joug, la viole avec une bouteille, la torture, manque de la noyer, tente de la faire passer pour folle avant de se confronter, de plus en plus impuissant, à la volonté farouche d'Hannah Strout. Il sombre alors dans la paranoïa, croit qu'elle veut l'empoisonner, l'assassiner dans son sommeil. Alors il la barricade, il met au sol de sa chambre du verre réfléchissant, sous son matelas une feuille de plomb avant de fuir le domicile conjugal. Il ne dort plus, ne se lave plus, ne se rase plus, ne s'alimente plus, néglige ses affaires et survit la peur au ventre un revolver dans une main qu'il tient d'une poigne incertaine. Pendant ce temps, Hannah Trout revit, trouve un amant, entame une procédure de divorce. Paris Trout est condamné à une peine ridicule pour l'homicide de Rosie, mais il n'entend pas aller en prison pour une nègre. Il est dans son bon droit. Le shérif local, lui-même, a du mal à l'arrêter. Mais tout s'achète, même la liberté qui a son prix pour l'élite. Cela dit c'est un achat bien ridicule au vu de ce que traverse Paris Trout. Reclus, acculé, défait moralement.

Le roman, parfaitement maitrisé et structuré, s'attarde sur les personnages principaux d'un drame qui ira culminant pour se conclure en une boucherie somme toute prévisible. Violent, insensé, abouti et stylisé : Pete Dexter dans son œuvre, œil détonant et décapant de l'Amérique frustre des petits péquenots et des héros modestes et banals. Ou l'antithèse du rêve américain, de ce cauchemar sans climatiseur...

Récompenses :
Prix du meilleur polar des lecteurs de Points 2011

Citation

Il aurait bien voulu lui raconter ce qui était arrivé, mais il ne s'agissait pas d'une histoire où certaines causes amenaient certains événements selon un ordre naturel

Rédacteur: Julien Védrenne mardi 08 novembre 2011
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