Les Hamacs de carton

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Roman - Policier

Les Hamacs de carton

Faits divers MAJ jeudi 19 avril 2012

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 19,8 €

Colin Niel
Rodez : Le Rouergue, mars 2012
284 p. ; 24 x 15 cm
ISBN 978-2-8126-0353-2
Coll. "Noir"

Zone exotique

Ici, en Métropole, nous avons toujours l'habitude de penser la France en termes unifiés. Évidemment, il y a quelques sans-papiers, des gens qui vivent de peu mais dans l'ensemble nous nous voyons comme l'incarnation de l'Occident moderniste. Et pourtant, ce que certains avaient qualifié de miettes de l'empire sont également des territoires français. À ce titre, la Guyane a le droit d'avoir des lois, des médecins légistes, des gendarmes, etc. Tout le roman de Colin Niel, Les Hamacs de carton, consiste à nous présenter cet univers à la fois français et exotique, dans ses aspirations et ses contradictions. Bien entendu, lorsqu'un crime est perpétré, la police enquête mais ses méthodes, les raccourcis qu'elle prend, et la façon dont elle résout les problèmes rencontrés joue aussi avec les particularismes locaux. Par exemple, si quelqu'un des villages reculés se suicide, il risque de perdre la considération des autres indigènes, aussi le gendarme doit faire preuve de beaucoup de lucidité pour arriver à opérer une distinction entre la réalité têtue des faits et leur conséquence pour la vie de la famille de la victime. Plus anecdotique, mais rendant le roman vivant, lorsqu'il montre le travail d'un garagiste à Cayenne, Colin Niel présente un homme plus occupé à réparer des moteurs de bateaux pour les orpailleurs que concentré sur des véhicules automobiles. De fait, c'est tout le travail policier qui est différent, car envie, désirs et mobiles sont différents de la réalité métropolitaine et Anato, le gendarme chargé d'enquêter, s'en rend compte assez vite...

En installant son intrigue autour de trois crimes : la mort suspecte dune famille dans une case au fond de l'Amazonie, la chute étrange d'une fonctionnaire française coureuse de fond, et l'assassinat d'une jeune fille sans histoire, Colin Niel balaie ainsi (avec une série de flashbacks sur la genèse d'une des affaires) la société guyanaise des petites gens des villes et des campagnes, les rapports entre métropolitains et indigènes (symbolisés par l'itinéraire personnel d'Anato, qui a toujours vécu à Paris mais a choisi de travailler sur le sol de ses "ancêtres"), l'exotisme des situations. Il montre l'absurdité de l'application automatique de lois conçues pour l'Europe et appliqués sans intelligence, à l'instar des hamacs de carton du titre qui sont en fait les dossiers de naturalisation de gens nés sur le sol français mais dont l'état-civil n'est pas très clair. Au final, à travers une intrigue de forme classique qui sait montrer de manière vivante les particularismes locaux, à travers des descriptions qui rendent crédibles et visibles la vie lointaine de nos anciennes colonies, Les Hamacs de carton ouvre une série à venir de bien belle façon.


On en parle : Carnet de la Noir'Rôde n°46

Nominations :
Grand prix de la littérature policière - roman français 2012
Prix Landerneau Polar 2012
Prix littéraire du Goéland masqué

Citation

Sous un ciel brulant où courait une meute de nuages boursouflés, la pirogue de la gendarmerie remontait le Maroni pour gagner Wetisoula, un village aluku. Trois décès suspects, aux dires de la compagnie de Saint-Laurent-du Maroni.

Rédacteur: Laurent Greusard mercredi 18 avril 2012
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